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12/10/2010

Quand Malanga parle de Charley....

TE BOUFFE PAS LA TÊTE par Gerard Malanga
Charles Plymell
Glass Eye Books / Ecstatic Peace Library


D’embée, Charles Plymell balance son premier coup en une fantasia de vibrations rythmiques dans « La théorie de la poussière meurtrie », qui surpasse même les premiers jets de Ginsberg. Et, ainsi donc, « Te bouffe pas la tête » est un recueil de dimensions modestes (29 poèmes réunis en 34 pages), empli de sévères mises en garde contre le mauvais sort et la destruction et des souvenirs de la planète Terre lorsqu’elle traversait des âges plus innocents, avec des vagues de blés chaleureux s’étendant aussi loin que le freux peut voler dans ces rêves du Kansas. J’ai lu ce plaisant petit recueil à haute voix de la première à la dernière page tout en écoutant, presque en sourdine, « Gaspard de la nuit » de Ravel et c’était pareil à l’émotion retrouvée dans l’un ou l’autre scopitone, comme si j’avais regardé par la fenêtre d’une voiture, avec Charlie au volant.

« Agenouille-toi, l’Amérique, et embrasse l’asphalte, tu as voté pour » est précisément l’un des vers mêmes qui fait mouche d’instinct. « (…) les succès trop répétés sont à coup sûr le prologue d’un désastre » en est un autre et, ainsi, la cupidité surgit çà et là, au moment où Charley se met à singer le jargon du Wall Street Journal afin que tous ces gusses en costard & cravate puissent comprendre entièrement une fois qu’ils auront terminé leur pause lunch et qu’ils se retrouveront sous une lumière aveuglante.

Charley est un homme au volant et il a passé beaucoup de temps sur les routes avant que Kerouac s’y mette (mais celui-ci ne conduisait pas) et, ainsi, il est solidement campé sur ses deux jambes :

« La création nous reproduit en double
à travers des éternités de sang et de savoir
de néons synchrones avec des lumières de tableau de bord
pirouettant dans toute une vie électrique. »

(de « Toi, regarde autour de toi »)

« Aujourd’hui, les autoroutes ne sont que des voies secondaires
et aucune ne suit ma propre voie. »

(de « Cette manie de rire au revoir »)

« Son esprit rouillé roule dans un pick-up
Jupiter hors sono
électro-corps précambrien
la banquette arrière pleine de canettes de Bud. »

(de « Les alambics crachotent séparément »)

« Fais du stop depuis la zone grise
Vire du côté de la route vers le sud
Sors du sud imaginé quelque part
En direction de la Gadoue du delta
Là où le coton est pur
Et où la chemise à pois clapote dans le vent »

(de « Lierre »)

… et ça continue sans arrêt, pour se terminer par « Poussière meurtrie » :

« Je me souviens du Kansas où tout étant mort et parti pour de bon
se muait en un tableau de bord presque éteint
avec la lumière verte et douce et des bouts de métal
pour garder les enfants d’un monde écroulé. »

Charley sait. Il sait de quoi il parle. Il vient d’une longue tradition de fileurs de coton et d’avaleurs de rails. Il a regardé dans toutes les directions et d’innombrables fois scruté ces champs où il a traîné quand il était môme, où « les fleurs des couronnes sauvages ne poussent plus » et où « le vent dans l’herbe chasse au loin les années », et « (…) quelle solitude dans les ombres là où ils parcourent la vaste route ! ».

Avec Charley au volant de la poésie et moi sur le siège de droite, je ne voudrais pas d’autre route.

03/04/2010

Un gars pas de chez lui...

 

TiM WINTON

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Article paru dans Le Matricule des Anges Numéro 21 de novembre-décembre 1997

Vertiges et désolations dans le monde de Tim Winton. Ses personnages, qui évoluent dans des contrées inhospitalières, partent à la dérive. Leur bout de terre devient un bras de mer. Ils s'en vont, sans boussole ni gouvernail.

La détresse des grands paradis blancs

"Les mondes nouveaux doivent être vécus avant d'être expliqués". Les mots de l'écrivain cubain Alejo Carpentier à propos de son propre continent pourraient résumer le roman Cet oeil, le ciel, qui se déroule en Australie. En d'autres termes, il faut s'imprégner du décor, de l'atmosphère de l'ouvrage pour le comprendre. Ça s'explique difficilement, ça se vit, ça se lit! Ce désert rude où s'accrochent obstinément à la vie des buissons d'acacia, le soleil rouge qui cogne inlassablement aux fenêtres et le silence... immense. Tout cela, Tim Winton l'a vécu pour le décrire. Cet écrivain habite dans le Western Australia, l'un des états les plus désolés du continent australien, patrie des villes fantômes qui n'ont pas survécu à la fièvre de l'or du siècle dernier. A 37 ans, né à Perth (la métropole la plus isolée de la planète!), il porte déjà une oeuvre lourde d'une trentaine d'ouvrages. Cette année, le public francophone a l'occasion de le découvrir avec Cet oeil, le ciel (déjà publié en 1991 aux éditions Les belles lettres) et La femme égarée.

L'oeil fou

Le ciel bat des cils. Petit à petit, il lève ses paupières. Ce sont d'immenses nuages noirs qui s'écartent en mesure, en ligne. Ils laissent place à l'iris bleu d'un oeil qui contemple le monde, et qui lorgne tristement sur l'univers étriqué de Ort Flack. Ce gamin, héros de Cet oeil, le ciel, a douze ans. Ses parents sont des hippies qui se sont installés au fin fond du bush australien. Ils ont cédé au mirage du paradis blanc, fait de sables et de soleils éblouissants. Mais voilà que l'insousciant bonheur se transforme en cauchemar. Le père Flack sombre dans le coma après un accident de voiture. L'existence d'Ort en est bouleversée : tandis que sa mère ne fait front à rien, sa grand-mère perd ce qui lui reste de lucidité, et sa soeur se réfugie dans la haine. Lui Ort, voit un oeil au-dessus de la maison qui, pense-t-il, surveille la famille. L'arrivée d'un étranger donnera le signal du chaos final. C'est Henry Warburton, une sorte de prédicateur fou, qui s'immisce dans la famille et lui fait perdre ses derniers repères. Cet oeil, le ciel est un récit étrange, onirique où large place est faite aux commentaires de l'enfant : "Quand je me réveille, il fait nuit. J'entends l'eau chaude qui siffle dans les tuyauteries. J'ai fait un rêve. J'étais ici dans la maison, et des oiseaux blancs arrivaient, par centaines, venant de nulle part. Ils se sont mis en cercle et commençaient à atterrir dans les arbres. Très vite, ils ont rempli la forêt. Comme de la neige". Dérangeant, mélange d'hommes fous et de femmes faibles, ce livre ne laisse pas indifférent. Par la voix et les rêves d'un enfant, il tire insidieusement les lecteurs dans un monde de misère.

Disparue

Une dizaine d'années après Cet oeil, le ciel, l'ami Tim Winton a écrit La femme égarée. C'est sous d'autres latitudes que se déroule le roman, mais ô combien voisines dans ses sensations de solitude et de grands espaces : l'Irlande. Un autre de ces paradis blancs, lourds de nuages aussi laiteux que la laine des millions de moutons qui hantent la lande. Fred Scully et sa femme Jennifer ont décidé de quitter l'Australie pour une nouvelle vie en Europe. Ils tombent amoureux d'une vieille maison dans le sud de l'Irlande. Les jours sont longs dans cette maison inconfortable, que Scully retape en attendant sa femme et sa fillette Billie, reparties régler quelques affaires en Australie. Leur retour est annoncé mais, à l'aéroport, Scully ne voit que Billie. Sa femme a disparu et sa fille est devenue muette. Alors commence pour Scully et Billie une cavale désespérée à travers l'Europe, à la recherche de Jennifer. "Le terminus de Rome était une vaste chambre de cris et d'échos, de crissements métalliques et de fracas de chariots lorsque Scully et Billie se mirent à courir vers le bureau Informazione, parmi la foule de gens suppliants qui s'aggrippaient à vos bagages. Scully se sentait puant, poussiéreux, froissé tandis qu'il sondait du regard l'étrange écran d'ordinateur sur lequel clignotaient des messages dans toutes les langues".

Traque sans fin

Plus la traque avance, plus la disparition de Jennifer est mystérieuse et plus le père et la fille s'égarent. Ils partent à la dérive, comme deux frêles esquifs sur une mer de houle et d'écume. Ils ont brisé leurs amarres parce qu'on a brisé leurs amours. Chacun s'enferme dans son calvaire et parcourt son éprouvant chemin de croix. La petite Billie qui sait mais n'arrive pas à dire. Et qui vit ce périple, cette fuite en avant, à travers l'Europe, ballottée au bras de son père. "Billie s'éveilla dans l'air sec de la montagne et ne vit rien au-delà de la route en lacets. La tête renversée et la bouche ouverte, Scully dormait toujours. Elle l'observa dans le noir tandis que l'homme devant chantait doucement pour lui tout seul, et elle sentit la nuit palpiter au-dehors, derrière son visage douloureux". Quant à Scully, qui crève de ne pas comprendre, il sombre petit à petit dans la déchéance et le désespoir. "Scully ne bougeait pas du tout, sauf pour soupirer ou renifler ou remuer les lèvres sans parler. Parfois, des larmes sourdaient de ses yeux étroitement fermés, mais il ne prononçait pas un mot". Dans cette traque qui chemine à travers la Grèce, l'Italie, la Hollande, la France..., on rencontre beaucoup de personnages ratés, de pseudo-artistes eux-aussi emportés au gré des courants et des flots. Ce roman est un voyage au long cours. On y est ballotté, délogé, abordé à bâbord et trucidé à tribord. Un seul écueil : il n'a pas de fin. Cette longue quête n'a pas d'issue, pas d'explication. Ce sont les derniers récifs contre lesquels on se brise.

Hubert Delobette

Cet oeil, le ciel
La femme égarée
Tim Winton

Rivages poche et Rivages
253 et 381 pages, 52 et 135 F

©

Le Matricule des Anges et les rédacteurs

07/03/2010

Comment construire un empire.....

16/02/2010

Juste quelqu'un de bien

In mémoriam

La nouvelle est tombée comme un coup de poing: Crash d'un ULM à Granville

Un ULM est tombé à terre à hauteur du golf de Bréville, au nord de Granville. L'accident aurait fait un mort et un blessé très grave. L'engin volant s'est "crashé" en bout de piste de l'aérodrome de Bréville. Deux personnes étaient à bord, Gérard Gautier, 55 ans, décédé dans l'accident, et un homme de 35 ans. Gérard Gautier était membre du groupe mammalogique normand.
Salut à toi le grand Gégé! 
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C'est pas le genre à la ramener sur le devant de la scène, loin de là même. Il préfère la discrétion bonhomme. Il cause pas beaucoup, mais quand il cause il sait de quoi il parle. Lui c'est tout le biotope des herbus de la baie du mont St Michel, la faune, la flore, les praires, les bulots, les salicornes et les phoques.
Pourtant il a bon caractère le Gérard, le Gégé comme tous l'appelle ici. Mais la mer qu'on vide à coup de filets de plus en plus grands jusqu'à épuisement des ressources ça le chagrine, et pas qu’un peu. Il suit les campagnes d’étude des anchois dans le golf de Gascogne sur la Thalassa et ce qui était prévu, depuis des années déjà, est arrivé. Les poissons, se font rare.

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Il n’est pas sûr que certaines espèces se régénèrent même en arrêtant la pêche immédiatement. L’anchois, le merlu, la sole, la morue, et maintenant les espèces des grands fonds qui sont aussi en voie de raréfaction. Ces espèces-là n’étaient pas habituées à subir une telle prédation. On a beau compter les œufs, voir où ils ont été pondu, connaître le Gulf stream c’est pas sûr que les anchois pointent à nouveau leur nez sur les pizzas. Voila que les japonais se remettent à la chasse à la baleine, que la chair des bélugas du St Laurent est gavée de Cadmium, que le lait maternel des mamans Inuits est devenu toxique à cause de leur alimentation à base de phoque… Cul par dessus tête il va ce monde.

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Photo: Gérard Gautier

Et il vous faudrait le voir parler de l'observation des phoques en ULM. Mais il refuse les interviews de la radio ou de la télévision parce que ça ramènerait trop de monde sur le coin et que les phoques ont pas besoin de voir des gens.
Ils ont rien demandé les phoques, sauf qu’on leur foute la paix quand ils font leur sieste sur les bancs de sable.
Alors ceux de TF1, ou de Monté Carlo peuvent courir. C’est pas lui qui leur vendra la mèche pour leur business. Il ne le dit même pas avec rancœur, non simplement avec le sourire du cueilleur de champignon, qui sait où et quand et qui même contre de l’argent ne parlera pas. Car le respect, ça se mérite, c’est comme la confiance.

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Photo: Gérard Gautier

Le Gégé, c’était un cancre à l’école, mais quand il cause aux jeunes, il vous faut voir comment ils l’écoutent et avec quel respect. Ils savent d’instinct qu’un bonhomme comme ça ne ment pas. Avec sa tête burinée et son bonnet posée sur son crâne qui n’est plus très couvert il a tout du sage.
Quand il était élève au lycée agricole, il n’y croyait pas aux rations de farine animale et à la poudre d’os pour améliorer l’alimentation des vaches. Des sornettes de cet acabit au gars Gégé ça refusait de lui rentrer dans le crâne. Fallait pas compter sur lui pour de l’intelligence pareille. Jamais avant il aurait dit ce qu’il en pensait de leur monde. Il préférait regarder les piafs par la fenêtre ça lui semblait moins malsain. Et le temps lui a donné raison. Ces gens qui le prenaient pour un imbécile heureux viennent le consulter, pour savoir comment ça peut se faire qu’ils aient pu se gourer à tel point. S’ils avaient regardé vivre les piafs, les rouges-gorges et les mésanges, peut être qu’ils auraient su comment l’équilibre de la vie est fragile. Tout ça c’est seulement du bon sens.
-Quand je pense qu'il y en a qui s'ennuient, moi j'ai pas le temps de tout faire. Il faut que je finisse mon ULM hydravion, celui-là pour me poser en mer. Il faudrait que je vende quelques photos pour me payer une caméra performante.

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Photo:Gérard Gautier
Alors le gars Gégé, c’est mon nez qui m’a conseillé de le guider sur le Salon du Livre jeunesse de Montreuil à la rencontre des éditeurs, parce que quand j’ai vu ses photos de dauphins, de baleine, de phoques, de fous de Bassan, de mouettes, et de tous ces oiseaux dont j’ai oublié le nom, j’ai su que ça les intéresserait, les minos et les marchands de papiers. Mais comme il ne connaît pas ce terrain-là, je l’ai guidé, comme il l’a fait pour moi entre les sables mouvants de la baie. Comme promis, voici aussi quelques belles photos prises par lui.

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Tournepierrre

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Stern artique

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Dauphin

Pour suivre le travail de recherche sur les phoques en baie du Mont Saint Michel Cliquez ici


27/01/2010

LE SOURIRE DU KLEENEX

Une nouvelle de Mouloud Akkouche

 

Pour tous les sans lumière.

     Le maître d’hôtel, un grand brun énergique, me conduisit jusqu’à mon rang. Sur chacune des cinq tables étaient disposés des cartons d’invitation.

-T’auras de bons pourliches et des autographes en plus pour le même prix.

     Dès qu’il s’éloigna, je fis le tour de la salle pour lire chaque nom : que des patronymes connus de la télé et du cinéma. Je zappais d’une table à l’autre. La vedette de la soirée était Marc Parly. Un prix allait être décerné au ‘’formidable acteur au grand cœur‘’ comme l’encensait les thuriféraires de la presse locale. Tel un catalogue de bonnes actions, le journaliste avait listé toutes les associations caritatives parrainées par l’acteur depuis 25 ans.  Un grand humaniste.

     Pas comme Philippe !

     La moitié de ma vie se mit brusquement à se rembobiner. Déjà presque un quart de siècle que Philippe m’avait larguée ! Pour une paire de seins qui passait par-là… Au retour du boulot, j’avais vu le mot sur le frigo et commençai à le lire machinalement en pensant qu’il manquait un produit de cuisine. Une courte phrase écrite au marqueur noir : Je te quitte.  Le frigo doit encore se souvenir de mes larmes et violents coups de bottes.  Depuis ce jour là, j’ai l’impression de n’être qu’un kleenex.

-Josiane, fit le maître d’hôtel. Allez terminer la mise en place de votre rang.

     ***

     A 19H15, Marc Parly descendit de l’avion en provenance de Paris. Il portait une casquette et des lunettes noires. Le pied à peine sur le tarmac, deux femmes et un garde du corps le réceptionnèrent puis le guidèrent jusqu’à une berline. Sans un mot, il s’assit à l’arrière et poussa un soupir.

     Imperméable aux propos de l’attachée de presse volubile, il alluma une cigarette et regarda la neige tomber derrière la vitre fumée. Perdu dans ses pensées.

     Son mobile  sonna.

-Allô !

-C’est Max, tu as fait un bon voyage ?

     Il fronça les sourcils.

-Pfff…. Non.

-Pourquoi ?

      Marc secoua la tête.

-Je n’ai pas envie d’y aller.

- C’est pas possible ! Ils doivent te décerner le grand prix du cinéma.

-Rien à foutre du grand prix !

L’attachée de presse pâlit.

-Mais…

-Ça me gonfle tous ces trucs !

     D’un geste sec, il  coupa son mobile et flingua du regard l’attachée de presse qui se tut.  L’homme qu’il venait de jeter était son agent.  Et aussi son plus vieil  ami.

     Quelques mois déjà que le moral de Marc menaçait de flancher. Son médecin n’avait diagnostiqué que les effets du surmenage. Marc savait bien qu’il s’agissait d’autre chose. Une poussée de lucidité. Les années de course à la gloire lui semblaient bien vaines, une gesticulation pour se sentir vivant. Rien de plus. Toutes ses mesquineries, trahisons et intrigues pour voir son nom en grandes lettres sur l’écran… Pour rien. Le tueur n’avait plus de dents. Même si le public l’adulait, Marc sentait au fond de lui le pantin trimballé de plateau télé en festival, un pantin gonflé de larmes qui, chaque nuit dans sa chambre d’hôtel de luxe, laissait glisser le masque à sourires et tentait de repousser les démons à grand renfort d’alcool. Le doute l’avait alpagué. Peut-être son cinquantième anniversaire ? Virginie, sa dernière conquête- une très jeune comédienne férue de mystique tout terrain-, tenta de lui donner une explication : c’est l’enfant que tu trimballes en toi qui est encore insatisfait et veut autre chose. ‘’Qu’est-ce que tu veux que je fasse ! avait-il rétorqué. Que je le noie ce gosse ! ‘’ Depuis, Virginie, excédée par ses crises de colères et ses montées de violence, était allée exercer ses talents de psychologue dans d’autres bras.  Une phrase -d’ado dépressif- obsédait Marc, griffonnée sur un cahier de collégien : je me suis tiré une balle dans la tête ; elle circule dans mon corps mais n’a pas encore trouvé son point d’impact. Quoi qu’il fasse, cette sentence écrite 34 ans auparavant revenait à la charge.

-S’il vous plait !

-Oui, fit aussitôt le garde du corps assis à côté du chauffeur.

-Arrêtez-vous là.

     L’attachée de presse plissa le front :

-Nous risquons d’être en retard.

-J’ai bien le droit de pisser, non ?.

     Le chauffeur se gara devant le Bar-tabac.

***

     Depuis mon arrivée, un commis ne cessait de faire des pitreries devant moi. Un beau gosse bourré d’humour qui rêvait de monter à Paris pour devenir acteur. Un doux rêveur sans collier. Malgré son jeune âge, il me plaisait beaucoup et j’avais l’impression de ne pas le laisser indifférent. Plusieurs serveuses, dont une brune très sexy,  étaient prêtes à le croquer à la fin de leur service. Un extra pour une extra.  Mais  pas avec une vieille comme moi.

-Josiane, on a pas le droit d’être triste comme ça, quand on est vivante, fit-il avec un clin d’œil

     Il avait tort. Même si mon visage portait par habitude un voile d’amertume, je n’étais pas triste pour autant. Au contraire ; jamais depuis des années, je n’avais ressenti un tel plaisir. Un grand bonheur. Je n’étais plus l’esclave d’une histoire. Fini la soumission. Enfin j’allais pouvoir devenir, pour reprendre les mots ressassés par l’assistante sociale qui s’occupait de mon surendettement : actrice de ma propre existence. 25 ans verrouillée de l’intérieur.

     Bientôt libérée.

  Sourire malicieux aux lèvres, le jeune commis-comédien de salle fouilla dans la poche de son gilet et sortit un brumisateur de la taille d’un stylo-plume. Interloquée, je regardais l’étrange bouteille de parfum. Ma stupéfaction augmenta lorsqu’il ouvrit soudain la bouche et s’envoya plusieurs giclées.

-C’est du cognac ! s’enthousiasma-il, c’est pour les invités officiels mais j’en ai piqué un. C’est pour le parfum intérieur. T’en veux ?

-Non… Je ne bois plus.

     Je jetai un coup d’œil à ma montre et gagnai les vestiaires. Le service allait commencer. Je devais être prête.

     Le tube de rouge à lèvres à la main, je restai un moment devant le miroir. Une femme me regardait ; elle n’avait pas envie de finir la nuit seule. Ni sa vie. Une femme  avec encore de beaux restes. De beaux restes à réchauffer…

     Ce 5 mars 75, un nommé Philippe Leroux  avait détruit mes rêves de bonheur, cassé mon jouet. Brisé un couple et un petit garçon de six mois. Un lâche incapable de me regarder dans les yeux pour me jeter à la face : je te plaque Josiane. Je l’avais harcelé au téléphone des mois et des mois  pour qu’il revienne mais, chaque fois, il m’avait envoyé paître en me disant que je n’en voulais qu’à son fric. Sa réussite sociale. Un jour, une voix de synthèse m’avait expliqué que le numéro de mon correspondant n’était plus attribué. Pendant des années, j’avais travaillé pour qu’il puisse se consacrer uniquement à ses projets et, jamais, je ne l’avais culpabilisé car il ne rentrait pas d’argent. Jamais. Orgueilleuse et têtue comme tous mes ancêtres bretons, j’avais décidé de m’en sortir seule et de le lui prouver. Pas besoin de son fric. Puis les années ont passé  par là; Adrien a grandi sans père, et moi je me suis aigrie.

     Mais aujourd’hui, je vais remettre les compteurs à zéro. Et enfin vivre moi aussi.

***

-Qu’est-ce qu’il fout ? s’inquiéta l’attachée de presse qui faisait les cent pas dans le hall de l’hôtel. Quel emmerdeur !

-C’est comme ça les stars, ricana le garde du corps. Elles sont pas sur les mêmes fuseaux horaires que nous.

     Elle lui jeta un regard méprisant.

-Ouais mais… j’ai tous les journalistes qui l’attendent pour la conférence. En quinze ans de carrière, j’ai jamais vu un type avec une grosse tête comme ça !

    Pendant ce temps, Marc Parly fumait sur le balcon de sa chambre. La culpabilité s’était renforcée. Les images du passé cognaient de plus en plus fort à la porte. Tout se mélangeait. Où se trouvait la balle tirée 34 ans plus tôt ?

     Il finit par descendre dans le hall de l’hôtel.

-Les journalistes  vous attendent, s’empressa de dire l’attachée de presse. Ils ont hâte de vous voir.

-Pas moi, grommela-t-il en poussant la porte tambour. Bon, on va le chercher ce putain de prix !

     ***

     Parmi tous ces j’aimebeaucoupcequevousfaites qui ne cessaient de se léchouiller les joues et regarder dans la gamelle du voisin, je me sentais très mal à l’aise. Personne ne s’en rendit compte. D’ailleurs : qui aurait remarqué une extra ? Une marathonienne de plus de 50 ans cavalant avec des assiettes à la main, entre la salle et la cuisine. Juste un kleenex sachant tenir son rang dans un banquet.

     Chacun son rang.

     A pas lents, je m’approchai de la table de l’invité d’honneur. Cachée derrière un pilier, il ne pouvait pas me voir. Il ne ressemblait guère à la photo sur les affiches placardées dans toute la région. L’acteur au grand cœur n’avait pas l’air dans son assiette que, d’ailleurs, il ne touchait pas. Même derrière ses lunettes, on sentait qu’il faisait la gueule. Contrairement à tous les autres invités dégustant des vins à pedigree, il ne buvait que de la bière. De banals demi issus de la pompe. Personne n’osa lui en faire la remarque, une star a tous les droits… même de  continuer de broyer du noir en pleine lumière. Quelle indécence ! Pourtant à la fin du repas, les membres du jury allaient lui décerner le prix le plus important de la profession. Quel égoïste !

-Josiane, qu’est-ce que tu fous là ! s’écria le maître d’hôtel. Retourne à ton rang.

     Le kleenex obtempéra. Mais dès que le maître d’hôtel s’éloigna, je me rapprochai encore plus près de la star. La serveuse en charge de sa table me lança un œil noir. Elle devait croire que je voulais lui sucrer son pourboire.

     Au garde à vous derrière le passe plats, le commis me fixait. Il gratta sa main sur sa joue, impatient de terminer son service et larguer son costume de Pingouin. Je lui souris. A quand remontait mon dernier sourire ?

-S’il vous plait !

     Le moment tant attendu se présenta. La star me fit  enfin un signe. Les yeux baissés, je me plantai devant elle et détaillai le carrelage. Très tendue.

-Oui, mon… monsieur.

-Une bière.

     Sous le regard agacé de ma collègue, Je gagnai le comptoir et demandai au barman une pression pour l’invité d’honneur. ‘’ Avec ce qu’il s’enfile le père Parly,, j’aurais dû prévoir un fut de rechange.’’ Dès qu’il déposa le demi sur mon plateau, je retournai vers la salle. Mais après un détour par les  toilettes.

***

     Acclamé par toute la salle debout, Marc Parly chaloupa vers l’estrade déjà chargée d’officiels. Ivre mort, il avait beaucoup de mal à marcher. Il ne réussit pas à monter. Un maître d’hôtel se précipita pour l’aider à grimper les quelques marches.

     Le président du jury lissa sa cravate et arma son sourire avant de déclarer :

-Cher Marc Parly, je suis très honoré de vous remettre ce grand prix qui, dans la famille du cinéma, est le plus important. Vous qui, à travers de nombreux rôles, avez su incarner…

     Soudain, Marc lui arracha le micro des mains.  Il ôta ses lunettes. Ses yeux n’étaient plus que deux poches rougies par l’alcool,  des poches vides.

-Trêve de blabla  ! Merci pour ce prix mais… Je tiens à vous dire, bafouilla-t-il avec l’index tremblotant, que je dois partager ce prix avec quelqu’un.

Un applaudissement l’interrompit.

-Je vous vois venir, reprit-il avec un sourire cynique. Non, ce prix… je ne le partagerai pas avec quelqu’un du milieu… Un milieu de dents longues comme moi et de cireurs de pompes comme vous tous, là, en ce moment…D’ailleurs, j’ai plus besoin de m’acheter de cirage. Regardez comme elles brillent.

     Agrippé à l’épaule de la femme du maire qui grimaça un sourire gêné, il souleva son pied. 

     Un silence s’était abattu sur  la salle, même les serveurs et cuisiniers avaient cessé leurs activités pour écouter les délires éthyliques de Marc Parly. C’est fastoche de cracher dans la soupe quand on la boit à la louche !  pesta le jeune commis qui aurait tué tout son arbre généalogique pour être à  la place de la star.

     Le président du jury tenta de reprendre le micro.

-Mon cher Marc, je… Vous avez un sacré sens de l’humour qui….

-Garde ton cher dans ta poche, mon cher… Et je n’ai plus d’humour, mais  que de la haine contre des cons de ton genre.  Je… Je tiens à remercier quelqu’un que personne ici ne connaît. Quelqu’un à qui je dois tout, quelqu’un qui a été le paillasson de ma gloire…Et ouais, j’en vois qui rit en se disant que je suis bourré mais c’est la vérité… Ma carrière s’est construite sur ses ruines.

***

     Souriante, je traversai rapidement la ville dans ma vieille R5. Une dizaine de minutes avant la remise du prix, j’avais quitté la salle de banquet. Sur la nationale bordée de platanes, j’entrouvris la fenêtre et jetai la petite bouteille. Un poison très efficace n’agissant que 12 heures après absorption.

     Seul le 5 mars 75 manquera dans les nécros officielles de Marc Parly : pseudo de Philippe Leroux.

     Je roulais vite, pressée de réchauffer mes beaux restes avec le commis.

 

18/01/2010

Pierre Guitton....

Pierre Guitton c'est beau tout simplement... Comme lui, sa façon d'être au monde, sa vie, sa peinture... Pierre tel quel, sans autres arguments que ses pinceaux pour dire... ce qu'il sent, perçoit, depuis toujours... Pierre peint, Pierre est peintre... Rien à dire d'autre...
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L'arbre aux fruits rouges.jpg
La maison jaune.jpg
La trapeziste.jpg

16/01/2010

Les poings sur les i.........

14/01/2010

À L'ÉCOUTE DU MALI...

Koiki di Wiki pour Afel Bocoum?

Il dit  qu'il est un musicienguitariste et chanteur malien, né à Niafunké en 1955.

Afel Bocoum est né d’une mère peule et d’un père sonrhaï, musicien. Ayant fait des études agricoles, il travaille à partir de 1978 dans le secteur du développement agricole1.

En 1968, âgé de 13 ans, Afel Bocoum rejoint son oncle Ali Farka Touré, natif aussi de Niafunké, au sein du groupe Asco2. Il quitte le groupe en 1978 mais poursuit sa collaboration avec Ali Farka Touré pendant une trentaine d’années.

Dans les années 1980, il fonde son propre groupe qu’il baptise Alkibar — ce qui signifie « messager du grand fleuve », en langue sonrhaï. Il utilise des instruments traditionnels comme la njarka (violon à une corde), la njurkel (guitare à deux cordes), la calebasse, à côté de la guitare acoustique3. En 1997, il produit un premier album.

Afel Bocoum chante principalement en sonrhaï, sa langue maternelle, mais aussi en tamasheq, la langue des Touaregs, ainsi qu'en bambara1. Ses chansons évoquent l’évolution de la société malienne, la reconnaissance de la femme, les mariages forcés, le respect.

Discographie 

  • 1999 : Alkibar
  • 2002 : Musique du Mali avec d'autres artistes
  • 2006 : Niger

Afel Bocoum
envoyé par Agnese

 

10/01/2010

Au bord de la crise..... de nerfs....

Simon Johnson, du MIT et du Peterson Institute for International Economics est le 4e, après Ambrose Evans Pritchard, Gerald Celente et Zero Hedge a annoncer le Grand Crash. Il a déclaré sur CNBC que "la crise vient tout juste de commencer" et que sur le "court terme les banques ont gagné", mais pas sur moyen terme: "des choses folles vont se passer car les banques se croient maintenant tout permis et le système financier devenu fou". Il a aussi ajouté que la Fed est folle de laisser sortir des milliards à 0% pour être reinvestis au Kazakstan et ailleurs ... dans tous les cas, les douze prochains mois vont être intéressants car nous nous préparons pour une énorme catastrophe". Boum. Cela a fait l'effet d'une douche froide sur CNBC et observez la réaction du présentateur: "Oooh meeen... here we go again...".

 

 

 

 

Donc cette année est celle de tous les risques puisque Zero Hedge note que 2009 a été l'année du gel du crédit et celle de la planche à billets qui a redonné vie au cadavre de l'économie. Quels que soient les calculs, le budget US de 2010 ne tient compte tenu de tout ce qu'elle doit rembourser et tout ce qu'elle doit émettre. "Out of the $2.22 trillion in expected 2010 issuance, $200 billion will be absorbed by the Fed while Quantitative Easing continues through March. Then the US is on its own: $2.06 trillion will have to find non-Fed originating demand. To sum up: $200 billion in 2009 and $2,1 trillion in 2010. Good luck.". Et selon Zero Hedge, il ne reste que 3 solutions à la Fed: 1) annoncer une nouvelle planche à billets... 2) augmenter les taux d'intérêt (boum) et 3) organiser la chute de Wall Street ce qui permettrait de mettre les comptes à zéro... avec un -30% minimum... Dans les trois cas, c'est une saignée à la Molière, mais dans tous les cas, les bons du trésor US ne sont qu'un immense système Ponzi qui va forcément exploser à un moment. Le plus tard possible... 

07/01/2010

Marcoeur à la clarinette, Lubat au piano...

Comme dit le proverbe: Noël aux tisons Pâques au balcon, il en existe un autre pas mal non plus: Quand Marcoeur est à la clarinette, Lubat est au piano....
Albert Marcoeur et ses frangins, lesquels chantaient dans les années 70 "c'est raté c'est raté, quand on s'énerve on rate toujours... sévissent toujours, avec autant de talent...
D'habitude il n'y a que des belges pour faire des choses comme ça... Allez, nos petits de Bourgogne....

Et puis on a aussi notre BERNARD LUBAT (lou Gascon) et Patrick Auzier, ces deux-là, côtoyés il y a bien longtemps entre Béarn et Landes, déménagent et démangent...
 

Deux de perdus... La fête continue...

Vic chesnutt, Lasha de Sela disparus, c'est une semaine chargée en émotions lourdes... Comme c'est pas notre habitude de sortir la planche à chialerie, même si y en a gros sur la patate, il en reste des artistes qui font toucher le ciel bleu... Ani Difranco, elle, est encore bien vivante... alors hommages aux morts et honneurs aux vivants... De la lignée des Moriarty, des Cat Power... du song, du sang, de l'âpre gris qu'on roule entre les doigts, du swing... Du vivant aussi...

 

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04/01/2010

Quand Vic Chesnutt fout le camp... Il nous reste Carla Bruni....

Décidément... c'est la série noire.... voir les hommages à ces deux-là sur le blog Ressacs il y a quelques mois...... bon Dieu que c'est rageant... On essayera de se consoler comme on pourra....

Sourions quand même au dérisoire de l'existence... il nous reste Carla Bruni...

 

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Ce qu'en dit le Carnet du Monde:

Né le 12 novembre 1964, à Jacksonville, en Floride, cet enfant adopté a grandi à Pike County, en Géorgie. Dans ce Sud profond, il se révèle un auteur-compositeur précoce. "Aussi loin que je me rappelle, j'ai toujours composé des chansons", se souvenait-il pour Le Monde, en 1995, "même quand je recevais une fessée, j'en inventais une". Accompagné d'une guitare sèche, ce musicien volontiers mélancolique et solitaire est marqué très tôt par le folk et le verbe de Bob Dylan et Leonard Cohen, les humeurs sombres de musiciens country comme Willie NelsonHank Williams ou Johnny Cash.

Il a 18 ans, après une soirée arrosée, un accident de la route le prive de l'usage de ses jambes. Loin de décourager sa vocation musicale, ce handicap précipite ses envies de quitter son Sud rural, pour la ville universitaire d'Athens. C'est là que Vic Chesnutt se consacrera à ses chansons et à la peinture. De sa chaise roulante, immergé dans la bohème locale, il se façonne un répertoire marqué par l'alcool et une ironie maniaco-dépressive. Seul ou avec un groupe, il écume les bars de la ville jusqu'à ce qu'un admirateur bouleverse son destin. En l'occurrence Michael Stipe, chanteur du groupe REM, star du rock alternatif, originaire lui-même d'Athens, qui en 1990, lui permet d'enregistrer son premier album, Little, puis un deuxième, West of Rome.

Sans jamais accéder à un large public, Vic Chesnutt, sa poésie cruelle, son humour noir et sa voix écorchée ont fini par séduire un important noyau de fans parmi lesquels beaucoup de critiques rock et d'artistes. En 1996, ces derniers lui rendront hommage dans une compilation, Sweet Relief II : Gravity of the Situation, enregistrée au profit des musiciens malades sans couverture sociale. Vic Chesnutt avouait d'ailleurs crouler lui-même sous les dettes en raison de frais médicaux entraînés par les nombreuses opérations qu'il avait subies. Cet album de reprises de ses morceaux comptait, entre autres, comme interprètes, REM, les Smashing Pumpkins, Garbage, Sparklehorse, Mary Margaret O'Hara et même Madonna.

En vingt ans, cet auteur-compositeur aura enregistré une quinzaine d'albums. Certains sont âpres et anguleux, d'autres témoignent d'un cafard plus lumineux et mélodique comme le formidable Is the Actor Happy ? (1995), souvent considéré comme son sommet artistique. Nombre de groupes et de musiciens de renom auront collaboré avec Vic Chesnutt, tels Lambchop, Elf Power, le guitariste de jazz Bill Frisell, ou récemment les Montréalais de The Silver Mt. Zion, pour l'album North Star Deserter, séduits comme d'autres par ce chanteur, grinçante incarnation de la vulnérabilité.

 

 

Ce qu'en dit  THIERRY COLJON

James Victor, dit Vic Chesnutt, est mort le jour de Noël, à l’âge de 45 ans. Il n’est jamais sorti du coma dans lequel l’avait plongé sa tentative de suicide. Il y a vingt ans, nous découvrions Little, le premier album de ce petit bonhomme doté d’un humour cinglant, voire désespéré.

Victime d’un accident de la route à l’âge de 18 ans, le natif d’Athens, Georgia, était resté paraplégique, se produisant sur scène dans une chaise roulante. On n’oubliera jamais ce concert au Printemps de Bourges qu’il n’a cessé de ponctuer par des « Jack Cheeraaack », tellement il fut amusé d’avoir serré la main du candidat président de la République. On le revit encore en première partie de Kristin Hersh à la Luna ou même au Travers, puis au Botanique.

Vic Chesnutt, c’était une voix et une plume, un véritable songwriter folk aux accents et fulgurances rock, chassant sa mélancolie à coup de grattes électriques. Ses deux premiers albums ont été produits par un ami proche : Michael Stipe de R.E.M., qui n’a jamais hésité à dire que Vic avait beaucoup influencé le groupe. En 1995, quand on rencontre Vic pour nous parler de son quatrième album Is the actor happy ?, il était dans tous ses états car il apprenait l’accident cérébral dont venait d’être victime son ami Bill Berry, le batteur de R.E.M. (à qui il avait d’ailleurs acheté sa maison). Mais Vic n’était pas l’ami que des Géorgiens. Même s’il n’a jamais vendu énormément d’albums aux Etats-Unis, l’Europe étant son principal marché, il avait bénéficié du plus bel hommage de ses pairs sur l’album philanthropique Sweet relief II : gravity of the situation, constitué uniquement de ses chansons reprises par R.E.M., Garbage, Smashing Pumpkins, Joe Henry, Cracker, Indigo Girls, Sparklehorse et… même Madonna.

« Je les connais tous, ce sont des amis. Tous sauf cette fille, comment elle s’appelle déjà ? Madonna ? », nous avait-il raconté à l’époque, amusé et fier à la fois. Car c’était un sacré lascar, le Vic. Dès le petit-déjeuner, il était déchaîné, bourré d’une énergie qu’on retrouvait sur scène et qui lui servait à dynamiter la plus désespérée des chansons, et d’histoires drôles qu’il racontait pour dédramatiser l’horreur de la vie. « J’étais soûl quand j’ai eu mon accident de voiture, nous avait-il raconté, mais ça ne m’a pas empêché de continuer à boire comme un trou. J’ai toujours bu, depuis que je suis gosse. L’alcool est une drogue horrible. Ivre, vous faites des choses regrettables, je suis bien placé pour le savoir. »

Vic n’a cessé d’enregistrer des disques. On retiendra surtout North Star deserter, enregistré en 2007 dans une chambre d’hôtel à Montréal. Il avait l’art de réaliser des chefs d’oeuvre en quelques jours. Il venait de publier l’album At the cut ainsi queSkitter On Take-Off réalisé avec Jonathan Richman. On l’a également vu dans le film Sling blade, avec Billy Bob Thornton, sur une musique de Daniel Lanois. Vic connaîtra certainement une gloire posthume tellement son oeuvre est riche de grandes chansons et de collaborations réussies avec Bob Mould, Kristin Hersh, Lambchop, Bill Frisell, Von Dyke Parks, etc.

Sa voix, ses plaintes déchirantes, sa science des arrangements et son amour immodéré pour l’alcool l’ont rapproché d’un Robert Wyatt qui a réussi, lui, à détruire ses démons. Vic nous a quittés et on ne rit plus.

 

Le blues est là... Quand Lasha s'en va....

 

LHASA DE SELA NOUS A QUITTE.

4 January 2010 par Jeff   Dans DECOUVERTENEWS

La transition 2009/2010 se fait décidément dans la douleur. Douleur de perdre des artistes de talents et trop méconnus. Après Vic Chesnutt, c’est au tour de Lhasa De Sela de s’en aller. Atteinte d’un cancer du sein, contre lequel elle menait un combat depuis 21mois, Lhasa a finit par lâcher prise et mourir.

Âgée de 37 ans, Lhasa De Sela avait séduit à nouveau avec un dernier album édité en 2009. C’était alors mis en place une tournée, malheureusement écourtée face à l’état de santé de la chanteuse. Une nouvelle fois, c’est bien trop tard, que beaucoup s’apercevront du talent immense de cette artiste. C’est dans ce genre de cas, que nous prenons conscience de l’importance de mettre en lumière d’artistes aussi riches et exclus d’un moule conformiste absurde.

Le meilleur hommage que nous pouvons rendre à Lhasa est tout simplement de se plonger dans son univers musical et plus généralement créatif. Fille d’une mère photographe et d’un père écrivain et professeur d’espagnol, elle a sillonné les Amériques et c’est très certainement de là, que lui vient sa richesse scénique. Une présence sur scène proche de celle d’une artiste de théâtre constamment habitée par ce qu’elle évoque. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Lhasa avait lancé son dernier album sobrement intituléLhasa au Théâtre Corona de Montréal.

Lhasa De Sela devrait être inhumée à Montréal, une ville métissée, à l’image de la chanteuse. 97ruedurock, vous propose de découvrir Lhasa à travers plusieurs extraits de ses différents albums

 

 

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09/12/2009

Made in Chinatown....

 

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02/12/2009

Babylo-pyrénéen ou la multiplication des identités...

Une journée dans la vie du maire de Bessonville

Ceci est un simple conte. Réveillé avec un large sourire, le maire de Bessonville est très honoré de l'invitation du préfet pour débattre de l'Identité nationale. Il a des choses à dire, lui. Pas un vendu comme beaucoup d'autres !

Il se jette sous la douche mais le chauffe-eau ne marche plus ; obligé de se laver à l'eau froide. Un café vite avalé, il appelle le plombier qui lui répond : « Pas de souci, je vous envoie Hamid. »

L'élu fronce les sourcils et demande s'il n'y a pas un français. Et l'artisan répond : « Désolé je n'ai que Hamid de disponible ce matin… Sinon, Eric mais ça ne sera qu'après-demain. » Le maire n'est pas à un jour près, de plus l'eau froide n'a jamais tué personne. Ca lui rappellera le régiment.

Sur l'autoroute, sa voiture se met à fumer et l'oblige à se garer sur l'aire d'arrêt d'urgence. Il téléphone au dépanneur et, en attendant, appelle le secrétariat de la préfecture pour signaler son retard. C'est un homme toujours ponctuel.

Enfin un Français ! 

Peu après, la dépanneuse se gare. Le maire satisfait de la rapidité mais blémit à la vue du noir en salopette de travail qui lui tend la main. Il refuse de la lui serrer, sans doute à cause du cambouis. Pas envie d'arriver dégueulasse à la préfecture. Professionnel, le dépanneur ouvre le capot et diagnostique une bielle coulée ; il doit tracter le véhicule jusqu'au garage.

Pendant ce temps là, l'élu du peuple français rappelle la préfecture pour s'excuser à nouveau de son retard. La voiture installée sur la plate-forme, le dépanneur propose au maire déjà très en retard de le déposer à son rendez-vous avant de se rendre au garage. L'édile refuse d'un geste agacé et pianote sur son mobile.

Enfin un Français, soupire-t-il rassuré en montant dans le taxi.

Dénouant sa cravate, il commence à parler :

« Vous vous rendez compte cher Monsieur, ils sont dix millions dans notre pays… dix millions qu'on paye à rien foutre. Des bons à rien qui saccagent nos villes. Ils ont raison les Suisses de voter contre ces putains de minarets. Bientôt on sera obligé de porter la gandoura et de voiler nos femmes. Ils nous volent même le prix Goncourt. Moi, si c'était moi, je les foutrais tous à la baille. »


Le chauffeur de taxi freine d'un coup sec.

- Vous pouvez descendre s'il vous plait, demande-t-il .

L'élu, décontenancé, lâche :

- Mais… mais….

Le chauffeur sort et ouvre la portière à l'arrière :

-Leroy Rachid pour ne pas vous servir.

Avec une demi-heure de retard, le maire arrive dégoulinant de sueur devant l'immeuble de la préfecture. Sans un regard aux mots « Liberté, égalité, fraternité » inscrits dans la pierre de taille au dessus de l'entrée, il franchit le porche. Bien décidé à défendre vaille que vaille l'honneur de l'identité nationale !

Le garde républicain, un petit noir rondouillard, lui demande de décliner son identité.

- L'invitation ne vous suffit pas ?

-Non, il faut aussi une pièce d'identité.

Soudain, le maire se rend compte qu'il a oublié sa sacoche dans sa voiture. Il explique la situation au garde républicain qui refuse de le laisser entrer sans une pièce d'identité. L'élu se met en colère et le garde républicain finit par appeler son supérieur. La secrétaire du préfet descend et règle le problème.

Nouvel accident

Très en verve et remonté, l'élu de Bessonville reprend ce qu'il a dit - d'une manière plus policé - au chauffeur de taxi. Ses alliés politiques, certains gênés, acquiescent avec des hochements de tête discrets. Puis la parole est donné à un autre élu choqué par ce qu'il vient d'entendre. Les débats terminés, le préfet invite tous le monde à venir partager un apéritif républicain.

Un verre à la main, le maire de Bessonville s'approche d'un vieil homme bardé de décorations et dit :

- Ca fait du bien de se retrouver entre bons français. Mais on les aura et… On s'occupera aussi des violeurs d'enfants. Faudra remettre la peine de mort ! Si je le tenais ce Badinter…

Il baisse le ton pour ajouter :

- Eux sont plus difficiles à repérer car ils n'ont pas de minarets. Tous à la télé, ils ont le bras long mais… on finira par le couper.

Le vieillard relève sa manche et dévoile un numéro tatoué sur son poignet :

- Jacques Lévy, déporté et résistant.

Le maire de Bessonville, victime d'un malaise après la gifle de Jacques Lévy, a dû être hospitalisé d'urgence. Selon son épouse jointe il y a une heure, son époux se trouve actuellement entre les mains du meilleur chirurgien de la région : « Malika Abdala ».

Espérons que l'élu retrouvera ses esprits et bien entendu sa pièce d'identité.

Merci à Luis Régo et « le tribunal des flagrants délires » sans qui ce petit texte n'aurait pu voir le jour.


27/11/2009

l'adieu aux larmes, etc....

Derrière Camus, l'adieu au livre au ministère de la Culture

A la Foire du Livre de Francfort le 14 octobre (Johannes Eisele/Reuters)

D'une main, le président de la République veut déterrer Albert Camus pour le panthéoniser et, de l'autre, il enterre le livre et la lecture en France. Effectivement, un décret daté du 15 novembre supprime carrément le poste de directeur du livre et de la lecture au ministère de la Culture pour le transformer en directeur général des médias et des industries culturelles.

 

L'effet Camus n'est donc qu'une manœuvre du prestidigitateur de l'Elysée pour camoufler la casse annoncée du livre en France. Bien joué ! Un beau leurre médiatique, sans compter les éructations nauséabondes de Eric Raoult jaloux de ne pas passer à la postérité comme Marie N'Diaye.

Très peu d'échos de cette suppression dans la presse, à part François Bon et l'excellente initiative - salutaire provocation au débat public -malheureusement pas du tout suivie de Lalie Walker et Francis Mizio.

Les fossoyeurs du livre ont-ils gagné la guerre ou juste une bataille ?

Le livre avait déjà beaucoup de mal à résister à la conjoncture économique et à notre époque de l'image. Et pour l'aider, notre ministre de la Culture, auteur lui-même et neveu d'un passionné de littérature, n'a pas trouvé mieux que de supprimer la direction qui lui était consacrée. Une page se tourne, peut-être la dernière.

Très mauvais horizon pour les auteurs, lecteurs, libraires, bibliothécaires, critiques, éditeurs, traducteurs… sur une planète éditoriale qui n'était déjà pas au beau fixe. Après la Poste, l'Education nationale, le secteur de la Santé, la série noire continue au pays de Voltaire.

Mais, cette fois, la casse de la lecture et du livre risque de passer complètement inaperçue. Une manif de bibliothécaires, auteurs, libraires, éditeurs, journalistes, attachées de presse, sera sans aucun doute moins efficace qu'une prise de bitume par des cheminots, pompiers, enseignants.

La marge de manœuvre est aussi étroite que l'esprit des technocrates ayant eu cette belle idée. Ont-ils lu dans leurs livres d'Histoire que les dictateurs adoraient au dessert les livres flambés ? Bien sûr, j'exagère et cette suppression n'a rien à voir avec la période sombre du pays de René Char. Cela dit, attention à la crise de foie démocratique.

Frédéric Mitterrand n'en parlera pas à Montreuil

Dix jours après ce décret s'ouvre le salon international du livre Jeunesse à Montreuil. Frédéric Mitterrand quittera son quartier de la place Valois pour aller l'inaugurer. Quel sera le contenu de son discours d'ouverture ? Fera-t-il allusion à la grande décision prise récemment ?

Pas du tout. Il évoquera le rayonnement de la littérature jeunesse et saluera le travail réalisé par tous les acteurs de la chaîne du livre sans qui cette manifestation ne pourrait se tenir :

« La vitrine de notre pays qui s'est toujours battu pour la création littéraire. Blabla…. Merci à untel, merci à une telle… »

 

Et, cornaqué par une poignée de collaborateurs, il ira serrer les mains qu'on lui désignera et retraversera la Seine. Sur le chemin du retour, il relira « Martin Eden » de Jack London et trouvera formidable la trajectoire de cet auteur né sans livres. Espérons que le décret du 15 novembre ne vienne pas perturber sa lecture.

A quand le dernier livre publié, les librairies transformées en bars branchés, les bibliothèques en horlogeries de luxe, les maison d'édition en boîte de nuit… Autres temps, autres mœurs. Mais pas de panique, nous pourrons regarder en boucle les œuvres de Dany Boon et, pour changer de registre, celles de Jean-Marie Bigard. Peut-être aurons-nous droit aux oeuvres complètes de Guaino ?

Albert Camus écrivait « Je fus placé à mi-distance de la misère et du soleil ». Aujourd'hui, on aurait plutôt tendance à écrire : « Nous survivons entre casse sociale et inculture bling bling“'.

PS : Cher Ministre de la Culture-sans-livres, jetez un p'tit coup d'œil gauche de l'entrée du salon du livre Jeunesse et vous découvrirez un ‘magnifique'’ camp de Roms à ciel ouvert dans la carcasse d'une usine. Cette vision vous rappelera-t-elle la lecture de Panait Istrati ?

26/11/2009

C'est à cause de la vache que vous ne dormez guère....

Drôle, voire jubilatoire...

Et bon appétit....

 

Copier cloner | Copy and clone from louis rigaud on Vimeo.

21/11/2009

Sauvons les riches (suite) !!!!!!!

Suite au référendum lancé par les Verts, citoyennes et citoyens obwaldiens se prononcent le 29 novembre sur ce que tout le monde appelle entre temps des «zones pour riches». Le professeur lausannois Jean Ruegg, de l’Institut des politiques territoriales et d’environnement humain, émet quelques doutes sur la démarche choisie par les autorités obwaldiennes.

Le canton d’Obwald aimerait se réserver la possibilité de créer des «zones d’habitation de haute qualité d’intérêt cantonal», destinées à des contribuables jugés particulièrement intéressants. Suite au référendum des Verts, le peuple se prononce le 29 novembre sur la révision de la loi cantonale sur les constructions. Neuf périmètres possibles sont présentés dans la . Ils doivent jouxter une zone à bâtir. Une telle zone n’est activée que si un acheteur se présente. Un règlement en fixe les conditions d’utilisation. La commune, le Conseil d’Etat, puis le Grand conseil se prononceront sur l’attribution définitive du terrain. émet des réserves envers les intentions des autorités obwaldiennes.

 

08/11/2009

Travailler moins pour gagner plus !!!!!!

Les Français sont les plus productifs au monde nous apprend le Business Insider

24/08/09 Business Insider - [traduction : Michel G. ]
Une nouvelle étude d’UBS a montré que les Français travaillent moins d’heures par an que le reste du monde. En moyenne, dans les plus grandes villes du monde, les gens travaillent environ 1902 heures par an et encore plus longtemps dans les villes asiatiques et du Moyen-Orient. En France, Lyon et Paris, les villes prises en compte dans l’étude, n’atteignent même pas les 1600 heures.
Pour Business Insider, si on s’arrête à ce chiffre, cela signifierait que les Français sont feignants mais ce serait se tromper complètement. Selon le site américain, la vérité est qu’ils sont les gens les plus productifs du monde.
Ainsi les Français se classent en dix-huitième position pour le PIB (Produit intérieur brut) par habitant et atteignent leur haut standard de niveau de vie en travaillant 16% de moins que les autres et 25% de moins que les Asiatiques.
Pour le site économique, si on compare leur PIB par habitant au nombre d’heures travaillées, ils ont le meilleur retour sur investissement possible. Selon leur calcul, la France a un revenu de 25,10 dollars par heure travaillée et par habitant contre 24,60 dollars pour les Américains.
Business Insider conclut ainsi: «On ne gagne pas juste en travaillant dur. On gagne en travaillant intelligemment… et moins. Comme les Français savent le faire».

27/10/2009

lhasa de sela

 

 

 

26/10/2009

Allez un dernier petit doigt, juste pour la route!!!!!

Quand le geste d'une simple citoyenne vaut mieux que tous les discours des tyrans....

 

 

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Même si cette image est un faux grossier, ce qui est prouvé, à cette adresse: http://www.hoaxbuster.com/hoaxliste/hoax.php?idArticle=80...

La représentation d'une réalité est-elle la réalité? Voir : ceci n'est pas une pipe de Magritte....etc... mais bien un doigt d'honneur....

 

20/10/2009

Dans une démocratie couchée....

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Combien coûte un intellectuel assis ?

 

Par Mouloud Akkouche 

Traqué à ses débuts dans les cours de collège, il doit fermer sa bouche, baisser la tête et raser les murs. Au lycée, ça va un peu mieux. Parfois, il se fait remarquer avec un mégaphone pendant des luttes politiques, durant le cours de philo et lors de débats avec des intervenants invités par les profs. Puis, le bac en poche, il décide d'entrer à l'université, Sciences Po, Normal Sup ou dans d'autres grandes écoles de la République.

A ce moment là s'opère un changement car les cartes sont redistribuées.

N'en déplaise à ceux qui occultent l'existence de classes sociales, il y a l'étudiant obligé de trimer pour remplir le frigo et l'autre, débarrassé de toute contingence matérielle. Celui concentré sur un cours passionnant autour de l'œuvre de Deleuze et son voisin de banc qui, de temps en temps, se laisse distraire par sa facture d'électricité impayée planant au-dessus de l'amphi. Même sans empêcher les relations humaines, les barrières sociales n'ont pas disparu, juste devenues moins visibles. Surtout dans les sphères intellectuelles, artistiques et politiques.

Un savoir peu monnayable qui fait honte

Des années plus tard, ce brillant étudiant se retrouve sur le marché du travail. Tant de labeur enfin récompensé. Pas du tout ! Il est montré du doigt comme dans la cour du collège. Improductif ! Pourquoi avoir perdu autant de temps sur les bancs de la fac. Fallait prendre une filière plus courte et efficace sur le plan professionnel. Et toujours quelqu'un lors d'une soirée pour balancer la fameuse phrase -citée de mémoire- d'Audiard :

« Un intellectuel assis va moins loin qu'un con qui marche. »

 

Qui dénigre cet étudiant à peine sorti de l'université ? Le citoyen lambda, la classe politique, les journalistes, les humoristes, certains slammers se targuant de ne jamais ouvrir de livres, les trolls frustrés agrippés à leur clavier… D'un seul coup, cet étudiant sérieux et ayant dédié une grande partie de sa jeunesse à des études très poussées se retrouve démuni. Un énorme travail réduit à néant.

Peu à peu, il va rejoindre la cohorte -nommée ainsi par deux auteurs- des « intellos précaires ». Souvent honteux de posséder tant de savoir, un savoir plus tellement monnayable à l'heure actuelle. Pas le seul dans son cas. De plus en plus rares, les diplômés en sciences humaines trouvant une place à la hauteur des recherches effectuées. Que deviennent-ils ?

Aigris ou -et- confinés dans un rôle sans aucun rapport avec leurs études. Par dépit, quelques-uns passeront de la matière grise à grisée… et finiront poète ou alcoolique. Ou les deux. Aimeraient-ils troquer tout leur savoir contre un dixième de reconnaissance public d'un Cauet ou Arthur ? Cela dit, le tableau n'est pas si noir car un certain nombre d'entre eux dégotent des boulots dans l'édition ou la presse audiovisuelle. Pas mal aussi sur Internet. Tout n'est pas perdu pour tout le monde.

Force est de reconnaître que les intellos issus de ces « usines à penser » sont parfois caricaturaux et frôle même le pathétique. Un chroniqueur de France Culture, évoquant un débat filmé à Beaubourg, avait dit : « Il y a donc eu une captation de cet événement. » Captation est sans doute le terme adéquat mais pourquoi ne pas être plus simple. D'autres chroniqueurs parlent de commettre un livre ou encore pire : un opus. Voilà que je me mets aussi à les dénigrer !

Sans doute suis-je aussi perméable que la plupart d'entre nous à la simplification à outrance du langage. Après tout, chaque corps de métier possède sa terminologie spécifique. Pourquoi pas les milieux culturels ? Quand un auteur ou un journaliste -souvent à la bourre- lâche « Faut que je ponde 8000 signes pour demain ! », le néophyte ouvre des yeux ronds.

Un investissement à long terme

Même si le ton de quelques chroniqueurs m'agace, je reste persuadé que France Culture est une radio vraiment importante, une radio enviée par nombre de pays. En espérant que la direction de Radio France, malgré le diktat des impératifs financiers, lui accordera toujours une grande attention. Nous avons besoin d'elle et des autres radios publiques qui peuvent d'ailleurs allier populaire et qualité. Gosse, mon père m'obligeait à écouter Radioscopie de Jacques Chancel sur France Inter en affirmant :

« Je comprends presque rien de ce qui se dit mais je suis sûr que c'est bon pour toi. »

 

Pourtant l'ouvrier analphabète aurait pu décréter que ces blablas radiophoniques n'avaient aucun intérêt concret. Pas des paroles qui remplissent un caddie au supermarché. Cette émission de Jacques Chancel serait aujourd'hui taxée d'intello et reléguée au cœur de la nuit. Grâce à ce rendez-vous quotidien, j'ai pu écouter Jacques Brel, Yehudi Menuhin, le professeur Barnard… La liste est longue. Chaque jour, un univers inconnu se glissait dans mon oreille. Combien d'autres élevés aussi en partie par la radio publique ?

Bien sûr, certains rétorqueront que les intellos dans leur tour d'ivoire sont loin des préoccupations des vrais gens. Qui sont d'ailleurs ces vrais gens ? Existent-ils des fausses gens ? Ce discours tendant à ridiculiser le moindre penseur, où toute tentative de réflexion approfondie, est extrêmement dangereux. Comme beaucoup d'entre nous, je sombre aussi de temps en temps dans cette facilité. Pourquoi ? Paresse intellectuelle ou manque de curiosité ? A cause de la fatigue du boulot, la famille, les soucis… Ou de plus en plus écrasés par le discours ambiant cherchant à tout niveler.

Evidemment, il ne s'agit pas de rejeter toute la culture de divertissement, le foot -que j'aime bien suivre- ni d'obliger qui que ce soit à lire en boucle « La Société du spectacle ». La culture, comme l'amour et l'amitié, ne doit pas être imposée. Certains ne manqueront pas de répliquer : chacun est libre de lire ce qu'il veut ou regarder le film de son choix, appuyer ou pas sur le bouton de la télé. Avons-nous tous la même liberté de choix ?

Combien rapporte donc un intello assis ? Beaucoup plus qu'on ne peut imaginer, de plus un excellent investissement à long terme. Ce collégien, vanné car intello binoclard et ayant plus de trois mots de vocabulaire, mettra au point la voiture du futur, un vaccin contre le sida ou un traitement révolutionnaire de la maladie d'Alzheimer. Et l'étudiant penché des années durant sur ses cours obtiendra un prix Nobel dont tout le monde sera fier. Ce jour là, ces « p'tits copains » d'école et les décisionnaires le dénigrant car non rentable salueront sa force de travail.

Les intellos assis font avancer la société tout entière.

article publié par Rue 89...

28/06/2009

Le curé qui nous a laissé un trou...

 

Les coups de gueule de celui-là nous manquent...

23/06/2009

La folle galopade du cheval mort

NDLR: en lisant Fano je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Pélieu. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Cendrars. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Ezra Pound... Depuis que j'ai lu Fano Je n'arrive pas à lire un type qui aurait une parenté avec ceux-là sans penser, tiens ça me fait penser à Fano...
Je recommande La lecture de Fano à tous ceux que je croise sur mon chemin en disant :
-Hé Fano vous connaissez? 
-Qui vous dites? 
-Fano des Carnets du dessert de lune!!!!
En général on me regarde comme si j'étais un cinglé... Pas grave, pas grave... 
-Les carnets de quoi?
-Du dessert de lune! 
-Mais qui a trouvé un nom pareil?
-Un éditeur belge...
-Ils sont bizarres les belges, et vous avez dit comment?
-FANO!!! sans point sur le i....

L'auteur
Né en 1947, Daniel Fano a fait le journaliste à Bruxelles de 1971 à 2007. Encouragé par Joyce Mansour, Henri Michaux et Dominique de Roux, il est entré en littérature en 1966. Auteur culte depuis sa révélation par Marc Dachy et Bernard Delvaille en 1973-74. Après Un Champion de mélancolie (Editions Unes, 1986), il a subi un long silence éditorial qui ne s'est arrêté qu'avec la publication de Fables et fantaisies aux Carnets du Dessert de Lune, en 2003. Ses ouvrages parus depuis lui ont valu le Prix de la SCAM Belgique en 2007.


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Il est encore possible de publier des livres tout à fait originaux, difficiles à classer, à définir ou à résumer. Ainsi de La vie est un cheval mort, dernier tome de la tétralogie que Daniel Fano publie aux Carnets du Dessert de Lune. Ce livre fait suite à trois autres romans, mais il n’est sans doute pas nécessaire d’avoir lu ceux-ci pour lire celui-là : de toute façon, c’est à une expérience de lecture inhabituelle que l’on est convié ici.
Les premières pages semblent appartenir à un roman policier : on a affaire à des armes et à des personnages aux noms étranges, contenant un nom propre connu (Patricia Bartok, Jimmy Ravel), un nom commun évocateur (Monsieur Typhus) ou présentant une structure improbable (les mots « Inspecteur et Flippo » désignant une personne unique). Mais, très vite, la scène dans laquelle on croit être entré se démultiplie et se fragmente : on a l’impression que les cartes narratives se sont mélangées, que d’une ligne à l’autre on passe à un tout autre point du récit. Puis, ce récit lui-même est abandonné pour laisser place à de tragiques morceaux d’histoire récente : quelques paragraphes sont consacrés, çà et là, à la violence guerrière, à l’antisémitisme, au terrorisme, aux exactions américaines en Irak, à Baader, à Khadafi, au Che Guevara, à Arafat, à Mao, à Staline, à Mobutu ou à Goebbels. À ces paragraphes se mêlent d’autres où, sans transition, il est question de mannequins anorexiques, d’actrices porno, de stars de la pop américaine, Elvis, Madonna, Marilyn Manson, de rappeurs bling-bling, d’un conférencier qui explique que « la société qui a remplacé celle des dinosaures touche à son terme », d’actrices hollywoodiennes, de Clausewitz qui professe que jamais l’humanité ne renoncera à la violence, de l’exposition de cadavres plastinés du docteur Von Hagen, de « l’épilation intime », de la « villa penchée » dans Le Mépris, de Desperate housewifes, de la cigarette dans un mouchoir de La dame de Shanghai, de « la modernité de Rimbaud qui tourne le dos au moderne », d’Internet, d’Iphigénie selon Euripide ou Racine, des filles du Crazy Horse, des journalistes qui confondent métonymie et métaphore, des considérations de Rousseau sur la masturbation, du joueur d’échecs Bobby Fisher, de Chostakovitch, du décolleté Wonderbra et des bas Dimanche devenus les panty Dim, etc. Certains de ces motifs ne sont présents qu’une fois, d’autres reviennent avec insistance. Et de temps en temps réapparaissent les personnages fictifs, dont l’activité consiste à perpétrer de nombreux assassinats. Ils reviennent d’ailleurs parfois tels quels : les pages 52 et 133, qui les mettent en scène, sont identiques.
Daniel Fano veut-il à travers cette construction habile et insolite faire passer un message ? Si l’on se place du point de vue politique, deux lectures sont possibles. Ou bien il s’agit de dénoncer d’un même mouvement la violence guerrière et l’instrumentalisation du corps de la femme – double dénonciation qui ne peut qu’entraîner une adhésion unanime. Ou bien il faut considérer qu’en racontant les horreurs perpétrées par les uns et les autres, Fano cherche à annuler toute distinction entre la gauche et la droite, la bande à Baader et les nazis, les Israéliens et les Palestiniens, Bush et Chavez, les talibans et Massoud, les attentats sanglants et les films pornographiques, toutes choses étant égales dans l’abjection… Cette seconde position, on le voit, est nettement moins consensuelle. Et, comme l’écrivain se trouverait dans la situation paradoxale qui consiste à émettre un discours contre l’idéologie, c’est-à-dire contre le discours, la déconstruction profonde du texte servirait alors à éviter la construction idéologique. Si la politique est ici omniprésente, elle se limite en effet à des faits sanglants. La profondeur est atteinte paradoxalement par la mobilité constante de la surface – et non par la fouille obstinée.
Mais peut-être, troisième hypothèse, Fano ne cherche-t-il pas à transmettre un message. Il aurait alors seulement besoin de dresser un constat, si amer soit-il, sans rien espérer de sa formulation. Et son moyen d’expression est alors la littérature, même s’il s’aventure aux frontières de celle-ci. « Son ouvrage est essentiellement polyphonique », explique un communiqué de presse. Je dirais plutôt qu’il est dodécaphonique : on entend une voix unique, celle de l’auteur, mais qui passe le plus rapidement possible par toutes les possibilités de la gamme, en juxtaposant les motifs sans se soucier de la vieille harmonie tonale. Il en résulte un livre grave et envoûtant, plus facile à lire qu’il n’y paraît à première vue, un livre qui ne ressemble à nul autre…
… si ce n’est au Repaire du biographe, que le même Daniel Fano fait paraître à La Pierre d’Alun. Il s’agit d’un livre illustré par Jean-François Octave, où l’on retrouve certains des personnages fictifs de la tétralogie, ainsi que quelques-unes des obsessions de l’auteur, notamment les stars hollywoodiennes. Le repaire est cependant moins dur que La vie est un cheval mort. Voilà deux entrées différentes pour accéder à l’univers éclaté mais cohérent de Daniel Fano.

Laurent Demoulin
© Le Carnet et Les instants N°157

Daniel Fano, La vie est un cheval mort, Bruxelles, Les Carnets du dessert de Lune, 2009, 148 p., 17 €.
Daniel Fano, sérigraphies de Jean-François Octave, Le Repaire du biographe, Bruxelles, La Pierre d’Alun, 2009, 75 p. 32 €

22/06/2009

L'île aux fleurs

Vous venez de voir la suite de l'épisode de l'arraisonement  du Yatch du très très très gentil Monsieur Lagardère et de ses immensément adorables invités d'honneur -comme notre très grand nouveau philosophe B.H.L sept fois entarté par l'affreux terroriste pâtissier - ainsi que du très immense et gentil, gentil grand homme qui inventa la cédille: Thierry Ardisson, du tout doux et rondelet Xavier Darcos, de l'adorable bambi du paquet Bonux: Ariel Dombale - lequel a été sauvé in extremis par de jeunes et joyeux étudiants, car ils se dirigeait vers l'île aux fleurs... Vive ces joyeux jeunes gens, vive notre président et ses gentils amis, vive la sympathique soirée, vive la jet set et son immense gentillesse et sa brillante élite...

19/06/2009

Y a pas de mal à se faire du bien...

Lhasa de Sela c'est comme Vic Chesnutt, Léonard Cohen, Concha Bulka, Ani di Franco, Abed Azrié; des artistes avec un tel duende que vous sentez que ces gens vivent au bord du gouffre, au bout d'eux même. Et quand ils chantent votre peau se couvre de chair de poule et raisonnablement vous ne pouvez allez contre ce sentiment d'immensité qui vous envahi. Ces êtres sont transparents, nus, et cette transparence les rends intemporels...

Koi ki di wiki sur le duende?

Manuel Soto Loreto dit Manuel Torre gitan espagnol né à Jerez de la Frontera (Cadix) en 1878 mort à Séville en 1933 était un chanteur (cantaor) et auteur de cantes flamenco.


Abed Azrié 

Manuel Torre est né dans le quartier de San Miguel, le 5 décembre 1878 fils de Tomasa Loreto Vargas, de Jerez, et de Juan de Soto Montero, de Algeciras, lui meme cantaor non professionnel et était le neveux de Joaquín La Cherna, cantaor et auteur de Siguiriyas. Il commence à chanter dans les cafés de Jerez sous le surnom de El niño Torre surnom attribué à cause de sa grande taille. Il rencontra Enrique El Mellizo qui l'initia au chant flamenco et dont il repris le répertoire. Il fait ses début professionnel en 1902 à Seville et enregistre ses premiers disques en 1909. En 1922 il est invité lors du concours de cante jondo qui se déroule à Grenade à l'initiative de Federico Garcia Lorca et Manuel de Falla. Devenu indigent et atteint de tuberculose , il meurt le 21 juillet 1933 dans son fauteuil. Sa famille n'ayant pas les moyens de payer son enterrement, le cantaor Pepe Marchena organisa un spectacle en son hommage afin de recueillir des fonds pour payer les obsèques. Une plaque commémorative et un buste à son effigie orne la place où il est né. Ses deux fils Thomas, et Pépé Torre ont aussi été chanteurs de flamenco.

Concha Bulka

Il est considéré comme l'un des plus influent cantaor gitan du début du xxe siècle, et fut l'une des figures représentatives du style de cante de Jerez. Il a laissé une quarantaine d'enregistrements réalisés entre 1909 et 1931, qui donne une faible idée de ses talents, Antonio Mairena précise: « Les amateurs de flamenco qui ont seulement entendu ses enregistrements, ne connaissent que son ombre, car il a fait tous ses enregistrements dans un état inconscient »1. Sur scène ses prestations impressionnaient le public, c'est à son propos que Garcia Lorca parla pour la premiere fois de « Duende » pour qualifier un état de transe lors de l'interprétation d'un chant flamenco. Manuel Torre le qualifiait ainsi: « Tout ce qui possède des sons noirs a du Duende »2. Il s'est spécialisé dans les chants primitifs tels les siguiriyas et les soleás, mais interpréta aussi des chants de type andalous comme les tarantas et les mineras ainsi que des saetas (chants religieux entonnés à cappela lors de la semaine sainte ).

 

Lhasa de Sela

 

Vic Chesnutt


 

 

Léonard Cohen

14/06/2009

hey, hey baby hey

Un petit coup de blues....

Patrick Hantz est guitariste, je l'ai connu dans un autre siècle... il y a de cela trente cinq vies.... dans un autre espace temps, un autre système solaire... je l'ai croisé à nouveau il y a une quinzaine d'années dans le couloir à Odéon... j'ai entendu ces accords de Dadi, je me suis arrêté... j'ai regardé le type jouer... à la fin du morceau je lui ai demandé: vous êtes Patrick Hantz? Il m'a regardé avec un air de tomber d'un échafaudage... vous me connaissez? Oui on se connaît... on était au bahut ensemble, il y a vingt ans... tu touchais déjà à Dadi... mais qui tu es? On s'est croisé souvent dans le métro... je m'arrêtais pour l'écouter dans le grand couloir de Montparnasse. Il y avait toujours beaucoup de monde pour l'écouter... pas étonnant, ce type est un monstre à la guitare... puis un jour il a disparu. Il a quitté Paris pour la Bretagne...  plus aucune nouvelle jusqu'à ce jour, où tapant son nom par curiosité sur Internet, j'ai retrouvé sa trace...

 

01/06/2009

Le cauchemar de Darwin (suite)

Peut être avez-vous vu ce drôle de poisson sur les étalages des poissonneries : le Panga. Les poissonniers ont souvent du mal à nous expliquer sa provenance et pourquoi son prix est si peu élevé. Un document de M6, nous éclaire sur le sujet.


Panga signifie force enMorée il est produit à l’échelle industrielle sur leMékong au Vietnam. Ce poisson se reproduisait difficilement en liberté, car les femelles devaient remonter aux sources du fleuve pour frayer. Comme pour les saumons, la course à la vie était dure et les naissances limitées. Mais le grand génie de l’homme réussi à changer tout ça ! Un chercheur s’est en effet aperçu qu’en injectant aux femelles pleines des hormones recueillies dans de l’urine de femme enceinte séchée cela permettait de déclencher la pontes des alvins. Les femmes enceintes produisent en effet beaucoup d’hormones qu’elles rejettent dans leurs urine, il a suffi donc à ce chercheur de recueillir ces rejets et de les déshydrater pour mettre au point des doses (vendue environ 1€) administrable par injection aux mères Panga. Résultat, les femelles Panga se délestent d’environ 500 000 Alevins par ponte.

L’élevage des poissons se fait ensuite dans de grands parcs sur leMékong. Leur principale nourriture est une farine importée duPérou, elle est élaborée à partir de déchets de poissons mélangés à du Manioc, du Soja (OGM ?) et à diverses céréales. Une nourriture bien différente de celle que l'animal absorbe à l'état sauvage, qui vient de l’autre côté de la terre en avion et qui n’offre aucune traçabilité sérieuse. Une fois le gavage terminé, les fermiers n’ont plus qu’à relever leurs filets pour récupérer les fruits de leur élevage. Le poisson sera ensuite découpé en filet par des ouvriers chinois payés à la pièce puis envoyé congelé par avion vers l'Europe. Sachez donc que ce poisson vendu à prix discount est le produit de la mondialisation et de la transgression des lois naturelles, qu’on ne maîtrise pas vraiment leur alimentation et que sa commercialisation à grande échelle est très gourmande en pétrole donc en émission de CO2.

26/05/2009

comité pour le sauvetage des riches!!!!!!!

Le Collectif « Sauvons les riches », dans le cadre de la campagne Europe-Ecologie, vise à instaurer un revenu maximal autorisé européen, de l’ordre de 30 fois le revenu médian, au-delà duquel les revenus seraient massivement imposés, sur le modèle qu’avait instauré Franklin Roosevelt en 1942, qui a fait chuter les inégalités aux Etats-Unis pendant 40 ans. Dans ce but, les jeunes contestataires, armés de baguettes de pain et de paquets de spaghettis, interpellent à leur manière nos amis les riches, accros à un mode de vie destructeur, non-généralisable, et finalement tellement triste.

25/05/2009

Du grain à Mouloud

Egalité républicaine : un Mc Do, une Sciences-po
Par Mouloud Akkouche


De passage à Paris, j'ai vécu une dizaine de jours dans un studio du VIIe arrondissement. Riverain éphémère, je me suis promené dans le quartier. En passant devant le collège Stanislas, les lycée Montaigne et Henri-IV, Sciences-Po, j'ai regardé ces jeunes gens en me disant : celui-ci sera juge, l'autre avocat, éditeur, cinéaste, journaliste, militant de l'ultragauche…

Cette belle jeunesse -plutôt uniforme- sous le soleil parisien était sympathique. Très joyeuse. Leur apparente désinvolture me fit penser à celle de mes gosses et à ceux de mes amis. Choisir sa vie est quand même le plus beau cadeau que nous puissions offrir à notre progéniture. Et je suis intimement persuadé que beaucoup de parents sont habités par ce rêve.

A Montreuil, un mélange de surface
Une demi-heure après, je me retrouvais à Montreuil : ma ville natale. A la sortie du métro, cette commune prisée par les agents immobiliers pour ses lofts offre un semblant de métissage social. Je dis semblant car un grand nombre d'enfants de bobos ne fréquente pas les écoles communales de leur secteur ; plutôt celles des villes plus nanties comme Saint-Mandé et Vincennes ou des établissements du type Montessori ou Decroly. Mais, quoi qu'on puisse penser, le centre-ville bénéficie d'un véritable foisonnement culturel ou le coude du plombier côtoie celui de l'artiste peintre. Comme disait Antoine Blondin : avec deux Whiskies, il fait beau partout. Et les différences fondent au moins jusqu'à la fermeture du bar….

Poussé par un irrépressible accès de nostalgie, je décidais de grimper dans le Haut-Montreuil -si haut que les habitants n'auront pas le droit comme les autres au Vélib. Ce quartier pas desservi par le métro où je fus écolier semblait étrangement détaché du reste de la ville, du pays. Comme dans les écoles des VIe et VIIe arrondissement de la capitale, les élèves se ressemblaient tous : uniformes eux aussi. Certes pas le même genre d'uniformité. Différents de beaucoup de jeunes montreuillois deux kilomètres plus bas, et à des années lumière du collège Stanislas. Un seul point commun à tous ces jeunes : leurs âges. Et l'énergie.

Que dire ? Que penser ? Le sujet ayant tellement été traité qu'il en devient presque vidé de sens, juste du grain à moudre pour les sociologues. Pourtant, debout devant mon collège, je ne pus m'empêcher de penser à la putain de difficulté de se frayer un chemin à travers ce labyrinthe de misère pour choisir sa vie. Juste autorisé à choisir sa survie. Comment continuer de croire que ces gosses appartiennent à la même trinité républicaine : liberté, égalité, fraternité. Dans certains quartiers, elle pourrait être rebaptisée : loyers impayés, électricité coupée, fin de droits.

Exporter Paris en banlieue ?
De retour à Paris, je passais en pleine nuit boulevard Saint-Germain. Près de la rue Saint-Guillaume, je me remémorais l'initiative du patron de Sciences-Po : proposer à des enfants issus de banlieue « défavorisées » un cursus scolaire dans son prestigieux établissement. Une espèce de Mercato de la matière grise dans les périphéries. Même si je trouve son initiative totalement inopérante, force est de lui reconnaître le mérite de la proposition. Contrairement à lui, je n'ai pas la moindre amorce de solutions : juste des interrogations. Et beaucoup de contradictions.

Mais tout de même étrange que ce responsable, sans doute très cultivé et humaniste, n'ait pas pensé à franchiser Sciences-Po dans ces contrées lointaines de France… A croire qu'il est persuadé que tout est foutu d'avance et, contraint et forcé par une dérive inévitable du système scolaire, accorde à quelques-uns la possibilité de quitter le navire pendant le naufrage. Et laisse les autres -moins compétitifs- se noyer. Pourquoi pas offrir au moins les mêmes chances éducatives à tous et sur tout le territoire ? Un Mc Do, une Siences-Po ? Bref, des jeunes séparés par quelques stations de métro « évoluent » dans le même pays, pas dans le même monde. Et on voudrait qu'ils sachent tous se tenir dans le monde.

La nuit suivante, accompagné d'un copain d'enfance aujourd'hui sans papiers, nous nous sommes arrêtés à « l'Old Navy », un bar de nuit. Sirotant une mousse, nous évoquions cette période où, descendus des hauteurs de Montreuil, nous nous accordions des haltes dans ce bistrot pour parler de littérature et peinture, avant de retourner à pieds ou en bus de nuit chez nos parents. Belle époque où les mains ne s'accrochaient pas sur les poitrines mais se serraient…

Dans les beaux quartiers, la force (de l'ordre) tranquille
Puis, après avoir essoré ensemble le passé, ce copain décida de me raccompagner dans mon antre provisoire. Près d'un ministère, son visage se crispa. Habitué aux nombreux contrôles d'identités à Montreuil où il réside toujours, il voulait s'échapper par la première rue à droite. Pourtant très proches et complices depuis longtemps (le premier à me faire lire Rilke), l'un et l'autre constations d'un seul coup que la ville lumière, si souvent arpentée et aimée à la folie, n'était plus du tout la même pour nous deux. Chacun d'un côté d'une frontière administrative, séparés par l'absence d'un rectangle de plastique dans sa poche.

Pour éviter d'attirer l'attention de la maréchaussée, nous restâmes sur le même trottoir de la rue de Babylone en devisant de poésie… comme avant Hortefeux et Besson. Occupés à monter la garde dans leur véhicule, les flics, après un bref regard sur les deux passants, continuèrent eux aussi leur conversation. Plus loin, il me sourit et lâcha : « Moralité : vaut mieux être sans-papiers dans les beaux quartiers. »

Mais aussi écolier.

texte publié pour la première fois par Rue 89

Ndlr: l'ami Mouloud m'a signalé son texte et c'est parce que je le trouve bien écrit et surtout témoignant parfaitement de la trajectoire de deux copains qui furent proches et qui sont maintenant séparés par une barrière administrative infranchissable que j'ai décidé de le repasser...