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26/06/2007

La vie aux indes

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Photo Bénédicte Mercier

Une belle et douce petite vache couleur daim avec ses cornes en arrière, et une tache de safran au milieu du front vous regardera sans vous voir et passera son chemin. Raisonnablement vous penserez que cette vache s’est échappée. Que vous allez voir débouler son propriétaire affolé venir récupérer son bien et reconduire la belle dans son enclos. Vous raisonnez encore. Et cela vous conduira à votre perte. Acceptez l’idée que vous venez de rencontrer votre première vache sacrée. Et le regard tendre dû à la douceur de ses yeux cernés de noir, et ses cornes peintes, une orange l’autre en jaune comme une beauté de comice agricole coquette vous provoquera autant d’émotion que le premier pas de l’homme sur la lune. Mais que fait donc un animal sacré ici ?
Cessez de penser et acceptez de la voire fouiller dans les poubelles au beau milieu de l’artère la plus commerçante de cette citée de deux millions d’âmes. Vous pensez encore raisonnablement que deux million d’individus dans une citée rendent la taille de cette ville importante. Détrompez vous, ce n’est qu’une insignifiante bourgade. Cessez de penser et immédiatement vous cesserez de vous agiter.
La raison, le cartésianisme, il faut oublier tout ça. Et en faire un paquet juste bon à foutre à la déchetterie. Ça c’était l’autre civilisation. La raison et le cartésianisme n’ont plus cours en ces lieux. Cette vache est urbaine. Elle dort sur une place de parking. Dans les poubelles, elle se nourrit de feuilles de bananier, de vieux journaux, de cartons et aux halles de détritus. Elle fait sa tournée de poubelle et comme le facteur elle connaît ses boîtes à lettres. Chaque matin, vous la croiserez sur votre chemin, impassible, les yeux emplis de la sagesse d’un maître yogi en méditation. Elle s’allongera pour ruminer ou bon lui semblera et personne ne songera à déranger la déesse nourricière. Paisible comme un chat qui se réchauffe dans les derniers rayons de soleil de l’automne sur une pierre tombale au Père-Lachaise. Son propriétaire qui habite deux pâtés de maison plus loin trait quotidiennement le peu de lait aromatisé à l’encre de rotative des journaux, qu’il revend dans son quartier.

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Photo Bénédicte Mercier

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