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22/12/2008

Front de libération du colibri

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Si comme moi vous êtes sensible au charme utopique du colibri, faites le savoir autour de vous...


20/12/2008

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Une nouvelle de Mouloud Akkouche


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45 degrés dehors, 34 à l’intérieur. Même volets fermés, l’appartement sous les toits était une fournaise. Allongé en short et torse nu sur un canapé, il dégoulinait de sueur. Les yeux cernés par une chasse nocturne aux moustiques, chasse rythmée par la sono des bars au pied de l’immeuble.
« On assiste depuis ce matin à un phénomène incroyable. Les gens se ruent sur les ventilateurs… »
_ Pas moi ! grommela-t-il en éteignant la radio.
La chaleur conjuguée au manque de sommeil, plus le courriel matinal de la banquière « Découvert largement dépassé. Veuillez rappeler d’urgence et ne plus vous servir de votre carte de crédit. », généraient une montée de bile. Et, condamné à rester dedans à cause de la canicule, sa nervosité risquait de croître. A moins que le coup de fil fut positif. Le patron d’une boîte devait l’appeler dans la journée pour proposer un poste deux fois mieux payé que le sien. Surtout ne pas rater l’appel.
Des bourdonnement firent trembler les murs.
_ Pouvait pas choisir un autre jour !
Il pestait contre les ouvriers qui intervenaient sur les canalisations. L’eau coupée jusqu’au soir. Il retourna s’asseoir et enfonça les écouteurs dans ses oreilles. Mais, très vite, il se releva du canapé brûlant et fit les cent pas.
Il écarta deux lames du volet. Personne dans les rues ni sur les terrasses.
Sur le bureau, une montagne de facture non ouvertes et de cartons de recommandés. Les étagères vidées des livres et C.D, tous revendus à très bas prix. Sa collection de B.D aussi.
Tout débuta par un spam ouvert par erreur : la pub d’un casino virtuel sur Internet. Cliquez ici et vous serez riche sans bouger de chez vous ! proposait une blonde avec un décolleté qui colonisait une partie de l’écran. Pourquoi pas, se dit-il sans imaginer où l’entraînerait ce premier clic. Au début, il gagnait beaucoup puis, peu à peu, alternait pertes et gains. Jusqu’au moment où les pertes s’enchaînèrent. Mais il voulut se refaire, empruntant même pour continuer de jouer. Bouffé par les nuits blanches, il ne fichait plus rien au boulot. Déjà deux mois d’ arrêt de maladie, les yeux rivés sur le casino virtuel. Persuadé de finir par toucher le jack pot.
Son mobile sonna.
_ Salut maman.
Il fronça les sourcils.
_ Mais non, je ne te fuis pas. Ecoute, je…
Elle l’interrompit et parla très vite. Il éloigna le téléphone, la voix s’égosillait dans le vide.
_ Ecoute, je…
Que dire ? Il regrettait d’avoir répondu. D’habitude, son numéro s’affichait. Elle laissait des messages qu’il effaçait sans même les écouter. Pas envie de s’étaler.
_ Je suis en déplacement pour mon job. J’ai un max de boulot en ce moment.
Elle ne le croyait pas.
_ Allô… Tu m’entends.
Il sortit sur le palier.
_ Quoi ? Je ne t’entends plus… Je te rappelle plus tard.
Un ouvrier posa un regard interrogateur sur lui avant de reprendre le perçage du mur.
Elle criait au bout du fil.
_ Je ne t’entends plus.
Il rentra et claqua la porte .
La chaleur avait encore augmenté. Il ouvrit le frigo: deux bières et un reste de pizza. Il décapsula une cannette, but une gorgée puis passa la bouteille sur son front.
Impossible de tenir en place. Corps poisseux, plus qu’une boule de sueur et d’impatience. Et ce mobile qui ne sonnait pas ! Il se déshabilla et s’allongea entièrement nu. Le lino le rafraîchit un peu.
Adossé contre le mur, il fixait le mobile posé entre ses jambes. Des heures qu’il attendait. Il n’ a pas que moi, je l’intéresse pas, il appellera plutôt en fin de journée… Toutes les hypothèses circulaient dans sa tête. Plus le temps avançait, plus les pessimistes s’imposaient. Il décida de composer le numéro de son –peut-être – futur patron. « Désolé, il est en rendez-vous extérieur. Je peux prendre un message ? ». Il lui raccrocha au nez. Rendez-vous extérieur, grommela-t-il, et moi je suis coincé ici comme un con !
Bien sûr, il aurait pu demander de l’aide à sa mère. Mais les intérêts avec elle étaient plus lourds que ceux de la banque. Sans compter les conseils en tous genres. Il vida la deuxième bière et s’amusa à faire rouler la cannette sous son pied.
La fin d’après-midi tirait à sa fin. La chaleur n’était pas retombée. Il avait la gorge sèche. L’épicier lui ferait bien crédit pour une bouteille d’eau. Mais dans l’escalier, son mobile ne passait pas ; s’il appelait à ce moment là ?
Il s’allongea sur le dos et ferma les yeux.
Soudain, il se précipita dans la cuisine et arracha tous les casiers du frigo.
_ Y en a marre !
Il se recroquevilla à l’intérieur et ferma la porte, son mobile dans la main.



La dernière parution de Mouloud.
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15/12/2008

René Barde

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Comment vous dire cette joie, lorsque dans cette valise en carton ouverte devant moi j'ai vu apparaître les manuscrits de René Barde tout jaunis, écris à la plume d'écolier de cette graphie nette, précise, belle... Dessinée avec cette minutie d'écolier appliqué. Une émotion intense en ayant l'impression de découvrir un trésor. De remonter des fonds de la terre, enfouie dans l'or du temps, la matière vivante de la parole. Plusieurs manuscrits, des aphorismes, et un gros pavé de mille pages. Puis ce texte intitulé Charlotte dont j'ai évalué le calibrage à environ cent cinquante mille signes. Un petit roman. Encore inédit, et dont je vous offre, Bernard Collet m'en pardonnera, la première page....


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La nuit était si noire qu’on distinguait à peine les maisons blanchies s’alignant le long de la route départementale qui traverse le village de Nasinghem.
Il pleuvait ; des passants pataugeaient dans la boue qui est l’élément des routes dans les campagnes, où comme l’on dit, le Bon Dieu ne passe jamais. Les clapotis des pieds se confondaient aux crépitements des rafales qui battaient dans les fenêtres avec le bruit chantant d’une criblure de grain tombant dans un grenier.
De temps en temps une auto passait à fond de train sur la route ; à la lumière de ses deux phares, on voyait des silhouettes se précipiter vers l’étroit trottoir et se blottir dans l’embrasure des portes pour se garer des éclaboussures.
La pluie en tombant devant les rayons lumineux blanchissait comme une tamisure d’argent, avant d’aller piquer de son éclat la boue qui luisait d’un or clair sur fond noir à la lumière des projecteurs.
L’auto passait, rapide, tombant dans les flaques, souillant sur son passage les devantures des maisons. Puis tout redevenait noir. Souvent le chauffeur était salué par une kyrielle d’injures abominables qui se perdaient avec le bruit des bars regorgeant d’hommes.

09/12/2008

Quand Pélieu s'amuse encore....

Claude grand farceur devant l'éternel barbu, continue à nous jouer de ses blagues... On a du retard à la parution... et pour cause... quel farceur ce Claude... Je récapitule dans le désordre... mon disque dur qui lâche, les chèques qui reviennent à leur expéditeur, le CD pour l'imprimeur qui s'égare dans la nature... le code barre de la couverture qui n'est pas bon, les fichiers qui arrivent de partout avec des mise en forme tordues impossibles à déverouiller, des images dont on à perdu la trace des auteurs, pas dans le bon poids de fichier... un original envoyé en recommandé qui s'égare... etc.... etc... Sacré Claude tu nous auras beaucoup fait rire... Des coquilles dans l'intro de la Crevaille qu'on a oublié de soumettre à l'auteur tellement préoccupé par tous ces lézards qui apparaissent à chaque instant... A Quel sorcier as tu recours cher Claude...Si je m'en réfère à Cocteau: je plaint les petits anges... La vache! qu'est ce qu'ils doivent prendre...

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le code barre de la crevaille

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08/12/2008

Walden ou la vie dans les bois.....

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portrait de Henry David Thoreau


Traduction française de Louis Fabulet

Quand j'écrivis les pages suivantes, ou plutôt quand j'en écrivis le principal, je vivais seul dans les bois, à un mille de tout voisinage, dans une maison que j'avais bâtie moi-même, au bord de l'Étang de Walden, à Concord, Massachusetts, et je ne devais ma vie qu'au travail de mes mains. J'habitai là deux ans et deux mois. A présent me voici pour une fois encore de passage dans le monde civilisé.

Je n'imposerais pas de la sorte mes affaires à l'attention du lecteur si mon genre de vie n'avait été, de la part de mes concitoyens, l'objet d'enquêtes fort minutieuses, que d'aucuns diraient impertinentes, mais que, loin de prendre pour telles, je juge, vu les circonstances, très naturelles et tout aussi pertinentes. Les uns ont demandé ce que j'avais à manger; si je ne me sentais pas solitaire; si je n'avais pas peur; etc., etc. D'autres se sont montrés curieux d'apprendre quelle part de mon revenu je consacrais aux oeuvres charitables; et certains, chargés de famille, combien d'enfants pauvres je soutenais. Je prierai donc ceux de mes lecteurs qui ne s'intéressent point à moi particulièrement de me pardonner si j'entreprends de répondre dans ce livre à quelques-unes de ces questions. Dans la plupart des livres il est fait omission du Je, ou première personne; en celui-ci le Je se verra retenu; c'est, au regard de l'égotisme, tout ce qui fait la différence. Nous oublions ordinairement qu'en somme c'est toujours la première personne qui parle. Je ne m'étendrais pas tant sur moi-même s'il était quelqu'un d'autre que je connusse aussi bien. Malheureusement, je me vois réduit à ce thème par la pauvreté de mon savoir. Qui plus est, pour ma part, je revendique de tout écrivain, tôt ou tard, le récit simple et sincère de sa propre vie, et non pas simplement ce qu'il a entendu raconter de la vie des autres hommes; tel le récit que, par exemple, il enverrait aux siens d'un pays lointain; car s'il a mené une vie sincère, ce doit, selon moi, avoir été en un pays lointain. Peut-être ces pages s'adressent-elles plus particulièrement aux étudiants pauvres. Quant au reste de mes lecteurs, ils en prendront telle part qui leur revient. J'espère que nul, en passant l'habit, n'en fera craquer les coutures, car il se peut prouver d'un bon usage pour celui auquel il ira.

L'existence que mènent en général les hommes est une existence de tranquille désespoir. Ce que l'on appelle résignation n'est autre chose que du désespoir confirmé. De la cité désespérée vous passez dans la campagne désespérée, et c'est avec le courage de la loutre et du rat musqué qu'il vous faut vous consoler. Il n'est pas jusqu'à ce qu'on appelle les jeux et divertissements de l'espèce humaine qui ne recouvre un désespoir stéréotypé quoique inconscient. Nul plaisir en eux, car celui-ci vient après le travail. Mais c'est un signe de sagesse que de ne pas faire de choses désespérées.

Si l'on considère ce qui, pour employer les termes du catéchisme, est la fin principale de l'homme, et ce que sont les véritables besoins et moyens de l'existence, il semble que ce soit de préférence à tout autre que les hommes, après mûre réflexion, aient choisi leur mode ordinaire de vivre. Toutefois ils croient honnêtement que nul choix ne leur est laissé. Mais les natures alertes et saines ne perdent pas de vue que le soleil s'est levé clair. Il n'est jamais trop tard pour renoncer à nos préjugés. Nulle façon de penser ou d'agir, si ancienne soit-elle, ne saurait être acceptée sans preuve. Ce que chacun répète en écho ou passe sous silence comme vrai aujourd'hui, peut demain se révéler mensonge, simple fumée de l'opinion, que d'aucuns avaient prise pour le nuage appelé à répandre sur les champs une pluie fertilisante. Ce que les vieilles gens disent que vous ne pouvez faire, vous vous apercevez, en l'essayant, que vous le pouvez fort bien. Aux vieilles gens les vieux gestes, aux nouveaux venus les gestes nouveaux. Les vieilles gens ne savaient peut-être pas suffisamment, jadis, aller chercher du combustible pour faire marcher le feu; les nouveaux venus mettent un peu de bois sec sous un pot, et les voilà emportés autour du globe avec la vitesse des oiseaux, de façon à tuer les vieilles gens, comme on dit. L'âge n'est pas mieux qualifié, à peine l'est-il autant, pour donner des leçons, que la jeunesse, car il n'a pas autant profité qu'il a perdu. On peut à la rigueur se demander si l'homme le plus sage a appris au cours de sa vie quelque chose qui ait une réelle valeur. Pratiquement les vieux n'ont pas de conseil important à donner aux jeunes, tant a été partiale leur propre expérience, tant leur existence a été une triste erreur, pour de particuliers motifs, suivant ce qu'ils doivent croire; et il se peut qu'il leur soit resté quelque foi capable de démentir cette expérience, seulement ils sont moins jeunes qu'ils n'étaient. Voilà une trentaine d'années que j'habite cette planète, et je suis encore à entendre de la bouche de mes aînés le premier mot d'un conseil précieux, sinon sérieux. Ils ne m'ont rien dit, et, probablement, ne peuvent rien me dire à propos. Ici la vie, champ d'expérience de grande étendue, inexploré par moi; mais il ne me sert de rien qu'ils l'aient exploré. Si j'ai fait quelque découverte que je juge de valeur, je suis sûr, à la réflexion, que mes mentors ne m'en ont soufflé mot.

Certain fermier me déclare : « On ne saurait vivre uniquement de végétaux, car ce n'est pas cela qui vous fait des os »; sur quoi le voici qui, religieusement, consacre une partie de sa journée à soutenir sa thèse avec la matière première des os; marchant tout le temps qu'il parle, derrière ses boeufs, qui, grâce à des os faits de végétaux, vont le cahotant, lui et sa lourde charrue, à travers tous les obstacles. Il est des choses réellement nécessaires à la vie dans certains milieux, les plus impuissants et les plus malades, qui, dans d'autres, sont uniquement de luxe, et dans d'autres encore, totalement inconnues.

Il semble à d'aucuns que le territoire de la vie humaine ait été en entier parcouru par leurs prédécesseurs, monts et vaux tout ensemble, et qu'il n'est rien à quoi l'on n'ait pris garde. Suivant Evelyn, « le sage Salomon prescrivit des ordonnances relatives même à la distance des arbres; et les préteurs romains ont déterminé le nombre de fois qu'il est permis, sans violation de propriété, d'aller sur la terre de son voisin ramasser les glands qui y tombent, ainsi que la part qui revient à ce voisin ». Hippocrate a été jusqu'à laisser des instructions sur la façon dont nous devrions nous couper les ongles : c'est-à-dire au niveau des doigts, ni plus courts ni plus longs. Nul doute que la lassitude et l'ennui mêmes qui se flattent d'avoir épuisé toutes les ressources et les joies de la vie soient aussi vieux qu'Adam. Mais on n'a jamais pris les mesures de capacité de l'homme; et on ne saurait, suivant nuls précédents, juger de ce qu'il peut faire, si peu on a tenté. Quels qu'aient été jusqu'ici tes insuccès, « ne pleure pas, mon enfant, car où donc est celui qui te désignera la partie restée inachevée de ton oeuvre? »

***

Biographie en résumé
Écrivain américain. Disciple de Ralph Waldo Emerson, il "fut un non-conformiste résolu. Après avoir vécu seul dans une cabane au bord d'un étang dans les bois, Thoreau publia Walden, récit de cette expérience, dans lequel il prêche la résistance aux diktats de la société organisée. Ses écrits expriment la tendance à l'individualisme fortement enracinée dans l'âme américaine" (Portrait des USA. Chapitre 10." L'Amérique et les arts" (Service d'information du Département d'État américain).
Dans son essai La désobéissance civile ( Civil Desobedience, 1849) Thoreau proclame son hostilité au gouvernement américain, qui tolère l’esclavagisme et mène une guerre de conquête au Mexique. « Pas un instant, je ne saurais reconnaître pour mon gouvernement cette organisation politique qui est aussi le gouvernement de l’esclave. (…) Je pense qu’il n’est pas trop tôt pour les honnêtes gens de se soulever et de passer à la révolte. Ce devoir est d’autant plus impérieux que ce n’est pas notre pays qui est envahi, mais que c’est nous l’envahisseur. » L’essai eut une grande influence sur le Mahatma Gandhi et sur Martin Luther King.

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