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02/12/2007

Rétrospective Malnuit

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et Réédition des Crobards



Si Kerouac avait été peintre et cycliste, il se serait appelé Malnuit. C’étaient bien-là leurs seules différences, à ces deux-là, pour le reste, ils buvaient autant l’un que l’autre et tous deux sont morts de leur éthylisme. Si l’ivresse n’a jamais fait le talent, Malnuit, aussi bien comme peintre que comme écrivain était bourré de talent.
Publié aux éditions Gallimard par Lambrisch dans la revue Le Chemin. La Grande Maison n’a ensuite plus accepté un seul de ses manuscrits. Pas assez ou trop... Allez savoir les impératifs de la mode littéraire et du business... Enfin, je ne vais pas cracher dans la soupe, sauf pour lui donner plus de goût, puisque grâce à cette défaillance, j’ai le plaisir aujourd’hui de le publier. Malnuit, c’est tout simplement le contraire de bonjour... Etrange karma lui aurait dit Michaux alors qu’il était allé lui rendre visite en vélo...
Il n’est pas né non plus, le bon jour, faut croire.
Malnuit, je l’ai côtoyé alors que l’alcool n’avait pas encore accomplie son oeuvre. C’était dans une autre vie, dans un autre siècle, lorsqu’il n’était pas complètement ringard de croire en une utopie de vie meilleure. Le temps nous a prouvé qu’on s’était fourvoyé. Les paysages de banlieues ont remplacé ceux des collines béarnaises d’alors.
Ses Crobards donnent déjà à entendre les craquements de son âme qui n’ont jamais cessé. Il désirait connaître la vie tout d'un bloc. Qu'elle lui rentre dans les veines comme un shoot maximum, une envolée de cheval blanc. Rien ne lui suffisait. Guère plus haut qu'un adolescent, mince et frêle, il se dégageait de lui une énergie fabuleuse. Il ne donnait pas l'impression d'être rachitique, mais solidement enraciné dans l'existence...
Ses discussions étaient des pugilats où chacun apprenait à palper ses limites. Tout était prétexte à parler, et parler donne soif. Pissant sur le pas de la porte, le regard perdu dans les montagnes, il continuait à éplucher la vie. Rien n'aurait pu tarir le flot des idées qui venaient se heurter dans son crâne. Angoissé par la mort et les années terribles qui s'avancent et serrent en tenaille dans leurs bras jusqu'à étouffer, il interrogeait tout et tout le monde sur le sens de la vie. Il continuait à chercher, sachant l'absence d'issue.
Il ne faisait que cela, survivre, chaque instant chassé par l'autre. Il tenait ses armes, un pinceau et un stylo. Le seul but à atteindre était de boucler chaque jour, en même temps que le soleil se couche, en ayant vécu debout et non à genoux. Il invectivait les morts et les imbéciles, tous les deux pareils. Il se savait vivant, en doutait quand même, mais ne se voyait pas vieillir. Il n’a pas vieilli non plus.
Son talent de parleur m'a toujours impressionné. Il pouvait monopoliser l'attention et boire toute la nuit sans sombrer dans un coma éthylique ou dans des propos ridicules et tenir son auditoire en haleine. Il me décapait la cervelle, bouleversait mon univers et en reculait les limites.
Et tant pis s’il s’en est allé prématurément, bien que ça laisse à ceux qui l’ont connu un arrière goût d’inachevé, dans cette nuit de novembre, ironie du sort, le même jour qu’Ytzac Rabin.. Aujourd’hui en le publiant je veux rendre hommage à ce qu’il a été, à ce qu’il m’a apporté alors que je rentrais juste dans le monde des adultes.
Malnuit n’est pas mort, puisqu’il publie encore...


Les Crobards



Crobards, de Michel « Mèze » Malnuit, pourrait n’être, de prime abord, que la chronique titubante d’un groupe de jeunes gens fréquentant les Beaux-Arts de Grenoble, au milieu des années soixante. Toutefois, près de cinquante ans plus tard, le texte révèle une essence bien plus riche : le texte, débridé, grave, cocasse, est en quelque sorte le testament d’une génération qui s’amenait, avec ses gros sabots, dans la révolte de Mai 68, foulant aux pieds à la fois une vie d’adolescent et les années dociles de Papa de Gaulle. Crobards révèle en fait, de l’intérieur, cet insatiable et subversif appétit de mots, d’ivresses, de questionnements et surtout de créations.
Il s’agit ici d’une première édition véritablement critique, plus de trente ans après sa parution confidentielle. À l’époque, le texte fut imprimé avec les moyens du bord, sans autre discernement que l’urgence, dans la facilité de l’ébullition post-soixante-huitarde, et surtout aucun travail éditorial n’avait été fait…
« Bédé », celle qui fut si longtemps la compagne de Malnuit, a saisi mot à mot le texte originel, et nous avons fait ensemble ce travail de relecture indispensable, celui que l’on demande à n’importe quel auteur avant publication. Malgré les pépites que le texte recélait, la veine n’était pas travaillée et le minerai brut : digressions oiseuses, délires éthyliques, logorrhées de peu de sens, ponctuation fantaisiste… Ce travail de galibot a été long et délicat : il fallait respecter la verve de Malnuit, mais la débarrasser de ces scories pour la livrer la plus pure possible à de nouveaux lecteurs. Ne reste maintenant, à notre sens, que la substance inaltérable de son récit, celle qui peut s’offrir à un plus vaste cercle que celui des copains d’alors.
Il s’agit donc de la remise à flots d’un navire trop longtemps échoué, mais donc le temps n’a pas altéré la véritable structure. Tout juste en a-t-il patiné le bois, pour lui donner plus de noblesse.
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Pour commencer juste un petit morceau pour le plaisir, comme on lèche les plats...



Crobard : n.m. Dessin à main levée qui ne fait qu’esquisser l’image d’un être ou d’une chose. (Petit Larousse – voir : croquis)

Au commencement y’avait le Chaix, tour à tour et en des temps reculés plate-forme de contrebandiers, bordel, relais de poste, rebordel… C’est là que Mandrin le globe-trotter aurait fait sa dernière halte et Jeanjack Rousseau y aurait chopé la chaude pisse fameuse qui le rendit bègue. Enfin soupe populaire, ce qu’il est resté jusqu’à sa mort glorieuse, le Chaix, notre fréquentation assidue ayant notablement assis sa renommée jusqu’à valoir à son blason une étoile, puis deux, puis trente-six chandelles et la faillite. Crucifié qu’il fut le Chaix pour avoir vulgarisé le tour de passe-passe de la Multiplication des pains – brevet déposé.
Heureux les affamés qui ont bouffé au Chaix car il n’y boufferont plus !

Dégueulasse mais pas cher. A midi c’était la flopée, et les coudes dans les côtes, et les haleines et les odeurs et la fumée et la couenne grillée, et les émanations plus ou moins audibles d’origine pas douteuse ; pot-pourri, art total, cour des miracles, messe rabelaisienne, symphonie fantastique pour mandibules en chaleur et grelots coincés et fourchettes à trois dents et à quatre dents, bouillon de culture et bouillon gras, synopsis crado-ubuesque, syzygie des sans-qualités, des sans-familles et des sans pécule, syndicat des sans intérêts, symbiose du bozart sans sous et du sous smicards sous le signe de l’omelette baveuse et dans la reconnaissance du ventre, foire aux tics, kermesse du bœuf, mode, en morceaux, aux carottes, aux lentilles, au jus, à l’eskimo, à la mau-mau, à la mauritanienne et à la dauphinoise, mais surtout à la chaixière qu’on appelait ça (recette : vous prenez les abats inutilisables de l’animal, vous les découpez en cubes anodins et vous faites bouillir deux jours durant dans une sauce vitrioleuse à la salive de syphilitique allongée de colle à bois ayant pour rôle d’intervenir au moment où l’esprit de corps menace de manquer au tout). Pendant que j’y suis, quelques autres spécialités de la maison : le chou farci, l’omelette aux fines herbes, l’omelette au jambon, l’omelette aux champignons, les tomates farcies, le gratin dauphinois, la salade niçoise etc. j’y renonce car sorti du chou farci, du bœuf aux carottes, de la verte, de l’omelette fines herbes et du fromage blanc, il fallait passer commande la veille et le Chaix ignorait la formule, non mais sans blague, qu’est-ce que vous croyez !
La Chaixière, une maîtresse femme s’il en fut, même si depuis l’exode elle avait oublié ce que c’est qu’être femme. Mais soyons juste : quand y’avait plus de bouillon et qu’elle montait sur la table pour rectifier le tableau noir, le génie du sexe, et bien malgré elle, révélait une grâce oubliée derrière les rotules, pas de la meilleure, ô non, mais une grâce, un reflet, un rien, là, à la saignée, à côté de la grosse veine bleue et méandreuse comme un affluent du Doubs. J’en connais qui jouaient aux fléchettes dans ce qui avait été sa paire de fesses, qui n’était plus bien sûr que larges crêpes retombées – Elle tournait pas souvent le dos à l’adversaire la vieille carne ; les dix secondes que durait la pirouette c’était feu à volonté ; les vieux vicelards se retrouvaient à la primaire…
- Tu le fais exprès de mettre ta fourchette sous mes pieds ? Attends un peu que je t’savonne.
Le pauvre bougre se ratatinait comme une figue sèche :
- C’est pas vrai, c’est pas moi
- Quoi tu rouspètes ? Allez et t’avises pas de rev’nir demain !
Mais dès qu’elle avait atterri sur le plancher des vaches la sanction passait au panier, à moins que l’autre ait une tête qui lui revenait pas – ce qui arrivait l’un dans l’autre une fois par jour.
Des copains se sont ainsi fait jeter et n’ont jamais osé y remettre les pieds, au Chaix, preuve que c’était des délicats et qu’ils s’étaient trompés d’adresse (exemple : un ancien qui se sentait béni parce qu’il seyait à côté du chef-cochon – c’était le cartel d’esbroufe chargé de contrarier notre mastication par sa présence intimidatoire – La vieille : « On t’a versé un pot de peinture sur la tête ? Ça fait plus yéyé p’t’être ?
Dommage que j’soye pas ta mère, tu l’aurais ta fessée. Non mais qu’est-ce que c’est qu’ces allures, tu crois que j’te reconnais pas pac’que t’as changé la couleur du poil ? C’est pas l’Moulin Rouge ici, allez, finis ta portion et que j’te r’voie pas avant d’êt’ passé au dégraissage ! » - Le gars revint jamais au Chaix).
Quant aux calottes, si la vieille en menaçait un ou deux, je ne lui ai jamais vu en mettre une. Sauf à MOI. C’était mon lot, mon privilège, personnel et exclusif. La première m’échut un soir au 9ème coup de 9 h. Sèche, précise, du plat de la main sur l’occiput. Le lendemain ou le surlendemain, quand elle remit ça, c’était déjà routine. Pour sûr, j’ai senti plus d’une fois que ces taloches portaient un message : c’était sa façon à la vieille de dire qu’elle nous aimait bien les copains et moi.

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Peinture de Malnuit

Commentaires

tout sur MAZIO c'est très bô !
de là où c'qu'il est y doit s'marrer (entre 2 bieres....euh...)
GLIG.
ps:heureusement reste BACAZE(accroche-toi quand même !...bizes...)

Écrit par : Gliglou | 10/12/2007

Cher mon Momo,
Putain. Comment que tu t'es mis la rate au court bouillon avec ce blaillot de Saint-Mar, ce cuistre, il mérite pas qu'on noircisse son blog de pied tendre de nos "zécritures". On devrait même y interdire à coup de lattes
à causer de Mazio et nous-z-autres. On boxe pas dans la même catégorie. Non mais.
Bises à toi mon bon gars. À la revoyure.
Bacaze

Écrit par : Ballouhey | 18/02/2008

Cher mon Momo,
Putain. Comment que tu t'es mis la rate au court bouillon avec ce blaillot de Saint-Mar, ce cuistre, il mérite pas qu'on noircisse son blog de pied tendre de nos "zécritures". On devrait même y interdire à coup de lattes
à causer de Mazio et nous-z-autres. On boxe pas dans la même catégorie. Non mais.
Bises à toi mon bon gars. À la revoyure.
Bacaze

Écrit par : Ballouhey | 18/02/2008

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