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14/03/2007

Les Crobards de Malnuit

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Collage Maryvonne Lequellec

Voila ça y est l'idée fait son chemin. On va republier Malnuit. Oui c'est un événement. Ce sera pour l'automne probablement. C'est Bédé qui s'est mis au clavier pour exhumer ces textes devenus introuvables. Je vous en dirai plus au fur et à mesure de l'avancée des travaux. Mais pour commencer juste un petit morceau pour le plaisir, comme on lèche les plats...

Crobard : n.m. Dessin à main levée qui ne fait qu’esquisser l’image d’un être ou d’une chose. (Petit Larousse – voir : croquis)


Ça durait comme ça jusqu’aux environs des alentours du petit matin blafard à parler de l’une, de l’autre, sur le mode de si j’aurais su… On avait fait son compte de tout ce qui n’avait rien à offrir susceptible d’émoustiller notre lard fatigué et désireux de vibrer tant soit peu… C’était l’heure du loup affamé de chair tendre… On sortait des vannes pour pas mollir au fur et à mesure que se débitait le petit cinéma intérieur ; on avait chaud ensemble et on entretenait soigneusement cette chaleur, à défaut d’une autre… Mais chacun était seul avec ses images, ses rêves, mâle solitaire, démiurge et enfant perdu dans l’univers de la femelle -. Je dis femelle, et non femme ; s’agit de chair, de viande, pas de sentiment, de tendresse. Une voie lactée du lait de milliers de mamelles de milliers de femelles… Au fond, de la tendresse, si, des litres et des quintaux de tendresse qui pissaient de centaines de mamelons dans notre gosier sec… du lait du sang et de l’urine qui débordaient l’écran du ciel et de l’imagination pour t’arroser, t’imbiber, te gorger comme une éponge et tu te sens revivre et tu es emporté, submergé, et tu roules dans la formidable soupe, et 1000 corps roulent sur toi, tombés de haut avec le crépuscule de l’esprit sain, son occlusion, 1000 corps de femmes qui te culbutent et te happent le souffle, coupé le souffle, à coups et à claques de bras et de mamelles et de jambes et de fesses et les bouches te sucent et te sucent et les vulves t’aspirent et te gobent et tu cherches des prises malgré toi comme si tu refusais d’être un minus une particule négligeable et dérisoire dans la sarabande des corps saisis du délire et de la folie et tu rebondis et tu glisses et tu descends et tu remontes et tu navigues et tu ricoches et et et tout est déchaîné il n’y a plus de nord ni de centre et et et les langues sont mélangées et et d’autres s’égarent et la tienne pend lamentablement lourde de bave et tâtonne pour retrouver le chemin du retour le retour le retour et pénètre rageusement dans tous les orifices et te tire et te tire à l’intérieur des ventres comme si tous étaient celui-là d’où tu es tombé car TU ES TOMBÉ D’UN VENTRE ET C’EST ÇA LA CHUTE ORIGINELLE.
Inondé du sang des femmes et de leur sève tu es en train de revivre le rite de la naissance et tu es le premier homme et le dernier et tu te débats dans la fantasmagorie infernale et divine du Commencement et tu retournes à la Source qui est sans commencement ni fin et de toutes tes forces débridées tu réintègres le chaos fondamental et l’ordre suprême de la nuit des temps qui est dans la femme comme le secret de la lutte des sexes et de l’attachement animal et du cannibalique et du platonique et le secret de ta faiblesse et ta misère et ta soif intarissable et ta faim perpétuelle et et et la femme s’ouvre et se referme et tu t’enfonces dans l’œsophage et tu pénètres dans l’estomac qui n’est qu’un sac et son anus s’ouvre et se referme et tu t’enfonces dans le rectum et tu pénètres dans l’intestin et sa vulve s’ouvre et se referme et tu pénètres dans la matrice et la femme s’ouvre et se referme mille et mille fois tu t’enfonces en elle et la femme s’ouvre et se referme et tu t’enfonces dans son cœur et tu pénètres JUSQU’À SON ÂME
Mais ce n’est plus toi c’est personne et tu assistes au gigantesque spectacle ébahi et secoué comme si une décharge faisait trembler au fond de toi tout au fond UNE CORDE quelque part tout au fond de la chair et tout au fond de la mémoire une corde et cette corde traverse ton plexus solaire et ton cerveau vibre doucement dans sa boîte imprimant aux globes de tes yeux une imperceptible bougeotte et ton voisin de table n’est qu’une tache d’encre presque une ombre et peut-être une illusion visuelle un grain de poussière sur ta pupille et la petite corde te fait un peu mal elle résonne autour de la nuque comme si le bulbe était à son tour secoué par un infime écho et tu voudrais penser à autre chose et tu passes la main sur ta nuque et tu te frottes les yeux mais ta pensée ne suit pas tu ne penses pas c’est personne et personne non plus ne pense pas comment pourrait-il penser lui qui n’est personne et personne c’est rien personne c’est rien personne alors. Alors…
— Quoi
— Qu’est-ce qu’on fait ?
— Qu’est-ce que tu veux faire ?
— Ché pas
— Et toi ?
— Ché pas. Rien…

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